Isabelle De Hertogh

Writer // Boris Rodesch - Photography // Sébastien Van de Walle

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Isabelle De Hertogh est connue du grand public en Belgique pour son rôle dans l’excellent road movie flamand « Hasta la vista ». Elle exerce désormais son talent en France, notamment dans les films d’Emmanuelle Bercot, « La fille de Brest », et de Claude Lelouch, « Salaud, on t’aime » et « Chacun sa vie ». L’actrice wallonne, qui vient de découvrir les joies de la maternité, est aujourd’hui ravie de retrouver les plateaux de tournage. Pollen a partagé un lunch avec Isabelle De Hertogh.

« Hasta la vista », c’est un tournant dans votre carrière ?

Un vrai tournant, je ne m’attendais pas du tout à un tel succès. C’est un film magnifique avec des super acteurs, Tom Audenaert, qui est génial, mais aussi Robrecht Vanden Thoren et Gilles De Schrijver… J’ai adoré travailler avec toute l’équipe dans son ensemble.

Vous êtes en train de tourner « Piégée », une série produite par M6. La série, c’est un format qui vous convient ?

J’ai déjà tourné dans plusieurs séries, « Inside » de Vincent Lannoo et un épisode de « Les petits meurtres d’Agatha Christie ». Le tournage de « Piégée », qui se déroule dans une prison de femmes, est particulièrement sympa avec un casting féminin quasi exclusivement belge. C’est formidable de jouer avec toutes ces actrices. Si ma préférence dans le travail de comédienne va malgré tout au cinéma, la série, surtout celle-ci, reste une super expérience ! Au cinéma, on bosse plus consciencieusement, presque de façon poétique. C’est un travail de précision et de douceur que j’adore. En télévision, tout est plus rapide, on tourne 6 minutes par jour et ça peut aller jusqu’à 9-10 minutes. Cela dit, la série est une école très intéressante parce qu’on n’a pas le temps de tergiverser, il faut toujours être dans l’action, le dynamisme et l’efficacité. Et on ne bâcle pas le travail pour autant puisqu’il y a énormément de boulot en amont pour être prêt le jour J. Cela demande une vraie rigueur. Au cinéma, on tourne autour de trois minutes utiles par jour, c’est plus tranquille et plus facile de reprendre son souffle tous les soirs. 

Votre avis sur la naissance des séries belges ?

C’est formidable pour le développement du cinéma en Belgique. Il y a tellement d’idées, nous avons un panier d’artistes de talent, des techniciens, des scénaristes, des réalisateurs ou des acteurs… Pourquoi toujours se taper la France pour pouvoir faire de la qualité, alors qu’on a tout ce qu’il faut en Belgique. C’est un premier pas intéressant, mais il faut aller plus loin et se faire encore plus confiance. « La Trève » ou « Ennemi public », ces séries belges fonctionnent très bien, mais quand tu apprends les salaires de chacun, c’est un peu misérable. Il faut absolument valoriser le travail des artistes, ça passe par de meilleurs salaires et une vraie reconnaissance. La Belgique devrait vraiment investir davantage dans la culture.

Racontez-nous votre rencontre avec Claude Lelouch ?

Nous nous sommes croisés longtemps après qu’il a décidé de distribuer « Hasta la vista ». C’est une histoire incroyable, le film est sorti en Belgique et il a été sélectionné pour plusieurs festivals, dont celui de Montréal. Claude Lelouch se baladait pour dévorer le plus de films possible, comme il le fait si souvent dans les festivals… Il est rentré dans la salle sans savoir quel film était diffusé et il est ressorti sidéré et séduit par cet ovni. Après avoir passé deux trois coups de fil, Il a décidé de distribuer le film en France et grâce à lui, « Hasta la vista » est ensuite sorti dans 32 pays au total ! Puisque j’étais la seule francophone de l’équipe, avec le réalisateur Geoffrey Enthoven et l’acteur Gilles De Schrijver qui sont bilingues, Claude m’a proposé de faire le tour de la France avec son équipe de distribution pour la promotion du film. Je n’oublierais jamais le festival du film de l’Alpe d’Huez. « Hasta la vista » venait de gagner le grand prix du public quand il m’a annoncé qu’il m’écrivait un rôle pour son prochain film. Je suis tombée sur mon cul. « Itinéraire d’un enfant gâté » ou « La belle histoire »… j’ai toujours été fan de ses films ! J’ai eu la chance de rencontrer mon chouchou Rufus, mais aussi Béatrice Dalle, Gérard Darmon… tous ces gens qui appartiennent à son univers. Claude a cette puissance d’attirer les artistes et de leur donner immédiatement l’envie de travailler avec lui, c’est une force très rare pour un réalisateur.

Et sur le tournage de « Salaud, on t’aime », vous rencontrez aussi Johnny Hallyday…

Ce film a été une aventure exceptionnelle. J’ai été extrêmement touchée de rencontrer cet homme avec un cœur et une intelligence énormes, qu’on ne décelait pas nécessairement dans les médias. Il avait une grande timidité et une grande pudeur et il s’intéressait à plein de choses, j’ai adoré discuter avec lui. C’était une très belle rencontre.

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Quelle est justement votre plus belle rencontre grâce à votre métier d’actrice ?

Sandrine Bonnaire, qui fait désormais partie de ma « famille de cœur » à part entière. Je dois aussi citer mon amie et scénariste Isabelle Willems. Elle m’accompagne depuis des années dans l’écriture d’une histoire, sur la naissance sous X et la quête de l’identité, que j’ai très envie de porter à l’écran. Je me souviens d’une soirée sur le tournage de « Salaud, on t’aime ». J’avais invité l’équipe du film chez moi pour manger un spaghetti. Sandrine a débarqué avec une bouteille de vin à minuit, tout le monde était déjà parti. Nous avons discuté jusqu’à 6 heures du matin et je lui ai raconté cette histoire qui m’animait tant. Elle est repartie avec mon semblant de synopsis pour le relire et le lendemain, elle m’appelait pour me faire part de son envie de réaliser le film. Elle nous a ensuite invitées chez elle à Paris avec Isabelle, nous en avons discuté ensemble et le projet a démarré. 

Pour conclure, quels seraient vos souhaits professionnels pour 2019 ?

Aller vers ce film que Sandrine va réaliser, que tout continue à se mettre en place aussi simplement pour qu’à un moment donné, on puisse se plonger à corps perdu dans le tournage, y aller à fond et vivre ce grand moment. Je suis certaine qu’il s’agira d’une étape très importante dans ma vie. Sandrine est d’ailleurs occupée à réunir un casting d’exception, il y aura deux très grandes stars, mais je ne peux pas vous en dire plus … Le tournage devrait commencer en fin d’année, ça approche, je le sens.