Déjeuner en mai chez bon bon

Writer // Antoinette Van Ham  - Photography // Michel Verpoorten

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Revenir déjeuner chez bon bon après plusieurs mois d’absence, reconnaître cette atmosphère si séduisante qui nous rappelle d’entrée pourquoi nous aimons tant ce restaurant, retrouver le magnétisme saisissant de Christophe Hardiquest en plein service, c’est un ravissement. 

Le spleen n’est plus à la mode, c’est pas compliqué d’être heureux, dit-il en paraphrasant la chanson d’Angèle. C’est dire si l’obsession d’humanité est révélatrice du vrai talent de ce chef noté 19,5/20 au Gault & Millau.

Christophe Hardiquest rayonne au milieu de son personnel de cuisine et de salle, auquel il offre le bien-être pour bien travailler en même temps qu’il lui apprend le bien-vivre. Très observateur, royalement exigeant, mais joliment sensible, c’est ce qui ressort des moments que l’on vole quand on a la chance de déjeuner au comptoir. 

Tu es engagé, lui dit une cliente en quittant le restaurant, on sent que tu es là, que la cuisine se fait avec toi, tu es jeune, tu es bien, toujours aussi créatif, au top ! Ce compliment-là, on le note volontiers pour lui, parce qu’il illustre sa réussite et le potentiel créatif de sa cuisine à laquelle on succombe une fois de plus. 

Être au top de la créativité, comme le suggère cette cliente, c’est compter sur une dream team qui a la jeunesse pour elle, mais aussi la tête sur les épaules, à laquelle le chef insuffle ses secrets, loyauté, respect, ouverture d’esprit, ordre, propreté et gentillesse partagée, une équipe dont il aime dire que c’est la meilleure au monde ! Ensemble, ils ont choisi de raconter le territoire belge. C’est là que toute la magie « bon bon » entre en scène. Ça ne tient pas à une simple envie de revisiter les plats populaires belges, c’est mieux. C’est un voyage qui nous transporte bien au-delà des 290 km couvrant la plus longue distance que l’on puisse faire en Belgique. De fameux produits au centre de l’assiette, qui, repensés, réassortis, réexprimés tels qu’ils le sont, nous embarquent ailleurs, dans une autre dimension de saveurs.

La petite histoire n’est jamais loin de la grande quand Christophe nous annonce son « Cheesecake de fromage blanc de Beersel au cabillaud, recouvert d’écailles d’asperges vertes, et caviar ». -Connaissez-vous l’origine du cheesecake ? Elle n’est pas américaine, elle est italienne ! Autant avouer que la première cuillère nous avait déjà emportés si loin, quelque part au pays de l’or blanc, que nous n’écoutions plus que d’une timide oreille… Mais on s’est rencardé. Oui, les origines du gâteau au fromage sont gréco-romaines. Des siècles plus tard, on le retrouvait dans une version à base de ricotta appréciée de la communauté italo-juive immigrée à New York. Aujourd’hui, le chef nous l’offre avec son sens étymologique, mais fondu de « Mandjeskaas », brillant !

Le proverbe japonais dit On peut aussi bien prier une sardine, ce n’est qu’une question de foi. Le poisson du jour est la lotte. A priori, ce n’est pas la prière qu’on choisirait, mais quand elle arrive, à peine cuite dans la Kriek Cantillon, celle de Jean-Pierre Van Roy, rôtie à la feuille de cerisier, avec juste ce qu’il faut de béarnaise de notre enfance, on est bien capable d’entrer en religion. 

L’agneau ibérique au menu de ce jeudi 2 mai a lui aussi sa part d’envoûtement dans un mélange pistache-menthe à se damner, rehaussé d’une dose de belgitude avec la touche très surréaliste d’un petit carré de chèvre de Gembloux. C’est là que le pétillant sommelier, Antoine Lehebel, apporte un rubis de rouge du Dao, Lagar de Darei, nous racontant que les vins de cette maison sont le fruit du travail d’un père et d’un fils, vignerons tous les deux, mais jamais d’accord sur rien. Quand ils décident de faire deux millésimes de blanc et deux de rouge, ils finissent par sortir six vins différents. On aime beaucoup l’anecdote. 

Entre six assiettes et autant de suggestions du sommelier, nous avons surpris le chef faisant renifler à ses jeunes commis le parfum du shiitake, ce champignon élevé dans les caves de Cureghem, mieux connu des Bruxellois comme le « Shieteke ». C’est dans un instant aussi furtif que celui-là que se révèle tout le pouvoir attractif de Christophe Hardiquest, la dimension de sa complicité avec ses jeunes cuisiniers et les clés de son art. C’est pas compliqué d’être heureux…


Lunch chez bon bon in May

Returning to bon bon for lunch after several months, recognising its captivating atmosphere, sensing again the magnetism of Christophe Hardiquest is a real delight.

This chef, who scores 19.5/20 with Gault & Millau, is obsessed with humanity.

He radiates amidst his kitchen and front-of-house staff, offering well-being at work and teaching the art of good living. He is highly observant, extremely demanding, but delightfully sensitive. 

Being at the peak of creativity means counting on a dream team with youth on its side but a sound head on its shoulders, ready to receive the secrets of the chef: loyalty, respect, open-mindedness, order, cleanliness and kindness. A team that he describes as the best in the world! Together, they have chosen to tell the story of Belgium. This is more than revisiting popular Belgian dishes. It’s a journey of famous products re-thought, re-paired, re-expressed, taking us into another dimension of flavours.

Christophe loves to tell stories, great and small. Cheesecake isn’t American. It’s Italian! Its origins are Greco-Roman. Centuries later, it was re-discovered in a version based on ricotta, appreciated by the Italian-Jewish community in New York. Today, the chef serves it with its etymological meaning, but with the typical Belgian ‘Mandjeskaas’ cheese. Brilliant!

A Japanese proverb says you can just as well pray to a sardine. It’s simply a question of faith. The fish of the day is monkfish. Not your first choice to pray to, yet it’s so delicious that anything seems possible. 

The sommelier, Antoine Lehebel, is equally full of anecdotes. The wines here come from a father-son partnership who never agreed on anything and yet produced six different wines!

Between six courses and as many wine suggestions, we came across the chef encouraging his staff to smell the perfume of the shiitake mushroom grown in the caves de Cureghem. A furtive moment that reveals the attraction of Christophe Hardiquest and his complicity with his young proteges. Being happy is not complicated …

Bon Bon**
Avenue de Tervueren 453 B
1150 Bruxelles
T. 02 346 66 15
www.restaurant-bon-bon.be
Ouvert du mardi au vendredi
de 12h30 à 13h30 et de 19h30 à 21h
Fermé les samedis, dimanches et lundis

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