The Author
Writer // Boris Rodesch - Photography // Sébastien Van de Walle
Connu pour ses chroniques dans « Le café serré » sur La Première mais aussi pour son Magritte du meilleur scénario reçu en 2016 pour « Le tout nouveau testament » (film réalisé par son ami Jaco Van Dormael), Thomas Gunzig a écrit plusieurs romans, nouvelles, spectacles et scénarios de bandes dessinées.
Pollen a pris le café avec Thomas Gunzig au Bar du Matin à St Gilles.
S’il fallait définir votre activité professionnelle ?
Auteur, c’est un peu vague mais ça recouvre l’idée de faire de la bd, du cinéma, du théâtre, des romans, des chroniques ou des nouvelles…
La principale différence entre ces types d’écriture ?
Il n’y a pas tellement de différences. Le vrai point commun, c’est le travail sur les émotions. Si au moment de bosser je n’éprouve rien, ça ne fonctionnera pas chez les autres…
Une routine pour l’écriture de vos romans ?
J’écris un nouveau roman plus ou moins tous les 3 ans. Entre la parution de mon dernier roman et le prochain - « La vie sauvage » le 31 août - j’ai fait deux scénarios de films, deux spectacles, des billets, j’ai donné cours à St Luc et à la Cambre. Je suis aussi sur le dernier Black & Mortimer avec François Schuiten et Jaco Van Dormael et j’ai lancé une nouvelle bd avec un dessinateur italien aux éditions Dupuis.
L’écriture de mes romans, puisqu’il n’y a pas d’échéance, passe forcément après.
Quel est votre regard sur votre ville, Bruxelles ?
C’est un regard paradoxal car c’est une ville agréable à vivre qui est atrocement mal gérée. Il est difficile d’y circuler, elle est sale et donne l’impression d’être abandonnée par ses politiques. Tout ça la rend très agaçante. Après il y a certains quartiers (comme ici à St gilles) qui sont très agréables. Ils ont ce côté convivial que je ne retrouve pas dans les grandes villes.
Le piétonnier, un non-sens ?
En deux ans rien n’a bougé. Il y a un rejet instinctif de la part des Bruxellois. Le piétonnier n’est jamais parvenu à justifier son existence.
Votre avis sur les jeunes chroniqueurs belges qui réussissent à Paris ?
Alex Vizorek et Guillermo Guiz sont deux potes que j’admire pour leurs talents formidables et très différents. Ce sont des vrais bosseurs. Ils font un boulot que je n’arriverais jamais à faire. Alex en termes de quantité de travail, c’est énorme. Avoir ce talent pour assurer simultanément un direct, un spectacle, et écrire 3-4 billets de bonne qualité par semaine… C’est impressionnant !
Guillermo a un côté étrange, à la fois brut de décoffrage mais très écrit.
Vous n’avez jamais été tenté par cette passerelle française ?
On ne me l’a jamais proposée et je ne suis pas certain que mon travail pourrait convenir aux chaines françaises.
Seriez-vous ouvert ?
Je serais flatté mais ça me ferait très peur. Fondamentalement je n’aime pas le boulot de chroniqueur.
Cela me fait stresser et me demande un long de temps de préparation.
Ce n’est vraiment pas ce qui m’éclate le plus.
Quelle est justement votre activité professionnelle préférée ?
Le roman, le rêve serait de n’avoir que ça à faire et puis écrire de temps en temps un scénario pour un bon réalisateur. L’idéal étant de ne plus avoir à bosser pour vivre.
Avec « Le tout nouveau testament », avez-vous profité de l’éclairage propre au cinéma ?
C’est étrange comme le cinéma continue à avoir un effet de fascination, plus que la littérature, le théâtre la danse ou la peinture et la photographie. Un mauvais film profitera toujours d’une fascination plus importante qu’un bon roman.
Étiez-vous naturellement proche de l’univers Vandormaelien ?
Nous sommes complémentaires. Il a un côté très doux et très poétique tandis que je suis plutôt plus acide et plus rugueux. Jaco Van Dormael appartient à ces artistes qui vous tirent vers le haut.
Votre film culte ?
Rocky 1
Que pourrait-il arriver de mieux à la culture ?
De l’argent ! Il y a beaucoup de talents en Belgique qui bossent dans des conditions misérables. C’est idiot quand on sait que la culture génère justement énormément d’emplois et beaucoup d’argent.
Votre avis sur les difficultés croissantes pour obtenir le statut d’artiste ?
Je suis militant pour le revenu universel. 1500 euros pour tout le monde. Fini le chômage, on relance la consommation et la sécurité sociale va beaucoup mieux. Tu as le droit d’être riche, tu as le droit d’être très riche mais tu as aussi le droit de ne rien foutre ou de perdre ton boulot et de réfléchir à ce que tu veux faire sans tomber dans la misère. Fini le CPAS, fini la peur…
Mais non, il y a malheureusement encore des a priori idéologiques complètements crétins.
Quels livres prendrez-vous dans vos valises cet été ?
Un des best sellers de l’année, « Sapiens », un livre scientifique qui retrace l’histoire de l’humanité. Je prendrai aussi « À la recherche de la mémoire » d’Eric Kandel. Il analyse le fonctionnement du cerveau et du système nerveux. L’auteur a reçu un prix Nobel.
S’il fallait tout recommencer ?
Je ferais la même chose. Bien-sûr on espère toujours réussir davantage mais je n’ai pas l’impression de m’être complètement fourvoyé. Désolé pour cette réponse classique…
Si je réfléchis, j’aurais commencé d’autres études que sciences politiques.
J’aurais fait la médecine.