1h22 avec Frédéric Beigbeder

Writer // Boris Rodesch - Photography // Michel Verpoorten

Frédéric Beigbeder multiplie les allers-retours à Bruxelles pour distribuer Le Philtre, sa vodka biologique 100 % naturelle, et pour présenter son dernier roman, Un barrage contre l’Atlantique.
Nous avons rencontré l’enfant terrible de la littérature française, qui se décrit volontiers comme « un vioque un peu fatigué » depuis qu’il vit en famille au Pays basque, loin de l’agitation des nuits parisiennes.

Boris Rodesch a pris le Thalys avec Frédéric Beigbeder.

La promotion, c’est un exercice qui te plaît ?

Le mot est très valorisant, « en promo », comme un baril de lessive chez Auchan. Je préfère citer André Gide qui disait « J’attends des autres qu’ils m’expliquent mon livre ». J’ai travaillé pendant trois ans sur un récit très personnel avec une forme originale, bizarroïde, qui me semble adaptée à un monde bizarre. Je ne sais pas très bien ce que j’ai écrit, et en réalité, cet exercice, qui consiste à écouter des réactions, va m’apprendre des choses sur mon travail. Sous cet angle, c’est beaucoup plus intéressant. Cela devient une conversation littéraire.


Écrivain, critique littéraire, publiciste, animateur TV, chroniqueur radio ou réalisateur. Quel est le lien entre ces activités diverses ?

Au départ, c’est du journalisme, c’est de l’écriture. Il y a une différence de support, mais c’est toujours un type qui a travaillé seul dans son coin et qui a écrit quelque chose. 


À quel âge découvres-tu le plaisir de la plume ?

À l’âge de huit ans, peu après le divorce de mes parents. Peut-être que s’ils étaient restés ensemble, je ne serais pas devenu écrivain. J’ai eu envie d’écrire quand j’étais avec mon père, pour immortaliser des moments trop rares. J’utilise mes livres pour éterniser ce qui est fugace. C’est curieux, cette envie d’écrire m’est tombée dessus comme un virus, mais pas chinois.


La première scène de ton film L’idéal, où l’on voit ce petit garçon déambuler dans une soirée festive entouré de mannequins sous substances… C’était ça, les nuits chez ton papa ?

Oui, il faisait des fêtes où je voyais des choses qu’un enfant sent qu’il ne doit pas voir. J‘avais souvent l’impression de déranger, mais en même temps, j’étais fasciné par la beauté de ces mannequins scandinaves, seins nus en smoking Saint-Laurent. Quel merveilleux traumatisme.


Un merveilleux traumatisme qui a participé à développer ton esprit de la fête ?

J’ai cru que je devais avoir cette vie-là pour épater mon père. Pourtant, ce n’était pas vraiment un fêtard, il aimait juste avoir du monde et des jolies filles chez lui. Avec du recul, je regarde tout ça à la fois comme quelque chose d’un peu féérique, mais aussi d’un peu malsain. Je me souviens de ce restaurant Chez Guy, où tout le monde dansait sur les tables. Quand on a 8-9 ans, on se dit c’est fou, ils s’amusent, mais j‘avais l’impression que c’était moi l‘adulte. C’était un sentiment étrange. 


Lorsque tu es étudiant en Sciences Po, tu organises des soirées en tant que président fondateur du Club des analphabètes cons mais attachants (Caca’s club), où tu rencontres notamment Thierry Ardisson. De fil en aiguille, cela débouche sur tes premières télévisions à Paris Première

Tout s’est enchainé. J’ai terminé mes études de Science Po, et finalement, on ne m’a jamais demandé mes diplômes nulle part. Je me suis retrouvé comme organisateur de fêtes au Caca’s club, et du jour au lendemain, j’étais célèbre, à l’image d’une starlette de la télé-réalité qui devient connue sans n’avoir rien fait.


Aussi parce que tu as réussi à attirer le gratin de la nuit parisienne et les médias ?

On parlait du Caca’s club partout, à la télévision, dans les journaux. Je me suis retrouvé comme l’incarnation de la tête à claques parisienne mondaine. J’ai commencé à être chroniqueur nocturne, je racontais les nuits parisiennes pour le magazine Globe. Ensuite, Ardisson m’a fait venir sur ses plateaux TV, et puis j’ai écrit mon premier roman à l’âge de vingt-quatre ans. J’ai eu énormément de chance et surtout, j’ai côtoyé des gens qui me prenaient pour une personnalité. Jean Edern Hallier, Thierry Ardisson, Bernard-Henry Lévy. Des intellectuels qui voyaient un jeune luron un peu farfelu, et qui tout de suite, lui ont donné du boulot comme écrivain. C’est dingue! J’assistais aux réunions de rédaction du Globe avec Pierre Bergé, Jean-Paul Enthoven, Gilles Hertzog… Au fond, je ne savais pas que je voulais faire partie de ce milieu littéraire, mais j’y suis rentré naturellement et pas du tout par la voie sérieuse classique. Uniquement par l’entrée de la rigolade et de la fiesta, mais aussi de l’esprit. Beaucoup moins que mon ami Édouard Baer — qui était le plus brillant d’entre nous —, mais malgré tout, il y avait des échanges un peu intelligents, un peu insolents, et ça a dû faire marrer ces intellectuels. 


Quelle serait ta critique de ton roman Un barrage contre l’Atlantique ?

Je dirais, qu’est-ce que ce garçon a voulu faire ?
Un livre avec des phrases disjointes et de grands espaces, Beigbeder serait-il paresseux, veut-il augmenter la pagination de son ouvrage en travaillant moins ? Je parlerais ensuite de cette progression. On entre dans le cerveau de quelqu’un, dans ce brouillard. Visiblement, nous sommes dans son crâne, il y a des paysages, des souvenirs qui reviennent, un homme qui est perdu parce que le monde est à l’arrêt, il ne comprend pas ce qui se passe et il se réfugie dans le passé. 


Le critique remarquerait-il un effort au niveau de la forme ?

Merci de le suggérer. Dans tous mes livres, je me pose cette question de la forme, je cherche une structure un peu nouvelle. On vit dans un monde chaotique très frénétique et j’essaie de faire des livres qui soient adaptés à cette époque. J’ai constaté avec intérêt que les jeunes ont du mal avec Guerre et Paix de Léon Tolstoï ou avec À la recherche du temps perdu de Marcel Proust. En revanche, ils lisent toute la journée des SMS et des Tweets. Si un roman pouvait s’adresser à eux avec des phrases courtes et les embarquer vers un récit et une fluidité, ce serait super. Il faut inventer des nouvelles formes de romans pour une nouvelle époque.


Tu as aussi choisi de mettre de côté tes doubles littéraires pour utiliser le « Je ». Il en résulte une grande sincérité !?

Dans un récit autobiographique, il faut être sincère et réduire au maximum la distance entre soi et ce qu’on écrit. Je ne dis pas que j’y arrive, il y a toujours des protections inconscientes. Même dans un récit aussi personnel, il y a des tricheries et des mensonges. J’enjolive sûrement les choses, j’essaie d’être beau.


Le fait d’avoir rédigé ce dernier ouvrage suite à ton départ de Paris explique-t-il son caractère si introspectif ? 

Cet exil urbain a changé complètement ma vie. Le livre reflète ça, il y a beaucoup plus de paysages, la nature est présente, et en même temps, c’est étrange d’écrire dans un paysage magnifique alors que le monde est complètement arrêté, plus de voyages, plus de magasins, plus de bars, plus de cinémas, une société sans société. J’ai trouvé tout ça très déprimant et très mélancolique pendant l’écriture de ce roman.

(NDLR : Si l’auteur vit à Guéthary avec son épouse et leurs deux enfants, il a écrit Un Barrage contre l’Atlantique au Cap Ferret.)


Qu’est-ce qui te manque le plus à Paris ?

En arrivant, je vais aller au Café de Flore pour regarder s’il y a encore une intelligentzia pleine d’esprit dans cette ville fascinante. J’aime bien ces conversations interminables où l’on parle de changer le monde sans le faire, ça a toujours existé. Paris est une ville brillante, peut-être une foire aux vanités, certes, mais j’avais envie de faire partie de cette élite de gens cultivés qui parlent bien et qui n’agissent pas. Je rêvais de ça, je suis heureux d’avoir la chance de côtoyer des écrivains, des journalistes, des philosophes, c’est comme faire partie d’un club qui réunit des gens qui ne sont pas trop cons. Évidemment, on peut se moquer du ridicule de tout ça, je suis le premier à le faire, mais malgré tout, si quelque chose me manque à Paris, c’est bien ça. J’aime ces moments où on boit des verres avec ces romanciers, où on évoque l’avenir de la littérature et on dit du mal de nos confrères, c’est un plaisir délectable (rires).


Tu en veux à cette pandémie de priver ta fille de 22 ans de sa jeunesse, mais aussi de te faire regretter la tienne ?

C’est vrai, un monde sans société, c’était quelque chose d’inimaginable. On n’aurait jamais cru qu’on puisse arrêter tout comme ça. Et dans l’indifférence presque générale, avec une sorte de docilité et d’obéissance assez surprenantes. La peur de la mort permet d’obtenir beaucoup de choses. Je ne juge pas les gouvernements, je pense que c’est nous — les citoyens— qui réclamons cette protection. La peur de la mort est assez récente. On demande aux pouvoirs de nous protéger, comme à une maman de nous dorloter. On veut être à l’abri de toutes les menaces, qu’elles soient liées à la santé ou au terrorisme, on voudrait qu’il n’y ait plus d’accidents de voiture, que plus rien ne puisse nous arriver.


Néanmoins, le romantique que tu es n’a-t-il pas été agréablement surpris par un tel coup d’arrêt au niveau économique ?

Faut regarder les aspects positifs, ça prouve qu’on peut le faire et c’est d’autant plus surprenant qu’on ne fasse rien pour le réchauffement climatique. On fait beaucoup pour un virus chinois et on fait très peu pour un cataclysme bien supérieur, qui s’approche inexorablement.


Tu avances à ce titre que « l’ennemi de la planète, c’est nous et que donc, sauver la planète tout en nous sauvant, ça devient compliqué » ?

Le principal problème, c’est l’humain. C’est lui qui tue les animaux, pollue les océans, réchauffe le climat… Comment faire, puisqu’on ne veut pas disparaître ? Il y a deux choses : premièrement, nous devons changer notre mode de vie, c’est le discours des écolos et ils ont raison. Mais si ça ne suffit pas, il va falloir se protéger contre la vengeance de la Terre, car les cataclysmes vont aller en se multipliant, et ça personne n’en parle.


Cela me rappelle Benoit Bartherotte, que tu présentes dans Un barrage contre l’Atlantique comme un Don Quichotte des temps modernes ?

Depuis plus de trente ans, il déverse quotidiennement des camions de rochers sur la digue devant chez lui pour protéger le Cap Ferret de la montée des eaux. Ce n’est pas du tout écolo, mais c’est un exemple de ce que l’on devrait faire en plus de changer de mode de vie, c’est-à-dire se défendre. Nous sommes devenus comme des parasites dans un milieu hostile. Je le trouve assez grandiose avec son barrage.


À votre échelle, avec ton frère Charles et ton ami d’enfance Guillaume Rappeneau, vous avez lancé Le Philtre ?

Depuis vingt ans, je me pose la même question : comment concilier hédonisme et écologie ? Un soir, assis sur la plage de Guéthary, nous nous lamentions sur le fait que consommation rime avec destruction, que l’écologie est souvent synonyme de résignation. Ne serait-il pas possible de boire une vodka sans détériorer notre planète ? Le Philtre Organic Vodka était né. Le message est aussi de dire qu’il faut essayer que l’écologie soit festive. Loin des discours moralisateurs, il faut la rendre amusante.


Dix années de fêtes, dix années de publicité, dix années de mode et dix années de média. Que dois-tu à ces différentes expériences ?

Elles ont nourri mes livres. Cela m’a aussi permis d’explorer les nouveaux pouvoirs que sont la pub, la mode et l’humour. Le pouvoir des humoristes est immense, aujourd’hui, ce sont les seules personnes qui ont le droit de tout critiquer sans qu’on ait le droit de leur renvoyer la pareille.


Revenons à la littérature : dans 99 francs, tu disais « J’écris ce livre pour me faire virer ». Sur France Inter, tu as écrit, ou plutôt non-écrit ta dernière chronique, sachant que tu risquais un licenciement. Finalement, c’est ta plume qui te sabote ?

Oui, c’est comme si chaque fois que quelqu’un m’offrait du boulot, j’avais envie d’être un cancre. Alors je me rassure en me présentant comme un lanceur d’alerte, comme un témoin qui raconte l’envers du décor, c’est mon alibi, mais la vérité, c’est que je suis plutôt comme un étudiant qui désobéit, c’est curieux. Peut-être aussi qu’inconsciemment, à chaque fois que je fais trop sérieusement un métier, je me dis qu’il faut que je me libère.


Suite à ton renvoi de France Inter, tu avais dénoncé une certaine « tyrannie du ricanement »,
causée par le choix des médias de transformer le monde en une énorme blague. Parce que, selon toi, on ne peut pas rire de tout ?

Uniquement quand c’est drôle. Le problème, c’est qu’il y a des humoristes qui ne sont pas drôles et qui deviennent des fonctionnaires du rire. Ce qui me choque, ce n’est pas l’humour, c’est le rire forcé. Il faut tout le temps rigoler comme les clowns angoissants qui ont des visages souriants, mais qui font peur dans les films d’horreur. Ce rire programmé obligatoire, je ne le comprends pas. Tu dois être drôle de 8h56 à 8h59. Il y en a qui sont très doués pour ça, ils fabriquent un truc, tu l’écoutes, tu as l’impression que tu t’es marré, alors que tu as juste assisté à un exercice de style plus ou moins brillant. Après, je ne savais pas que c’était un sujet si tabou, je pensais qu’on pouvait en discuter. Mais je n’ai jamais pu avoir cette conversation, parce qu’il n’y a pas plus susceptible qu’un humoriste. Tu peux te foutre de la gueule d’un écrivain, trois jours après il t’embrasse. Si tu oses critiquer un humoriste, tu es fâché à vie. Les humoristes n’ont pas d’humour.


Si tu devais pointer la différence entre le travail d’un écrivain et celui d’un réalisateur ?

C’est la solitude. Quand vous avez une soixantaine de personnes qui vous aident à raconter une histoire, ce n’est pas la même chose qu’être seul à la pointe du Cap Ferret en train de noter des phrases, pour essayer de transformer ses souvenirs en quelque chose de permanent.


Qu’est-ce qui fait une bonne adaptation au cinéma ?

Il faut que le metteur en scène trahisse et s’approprie le roman. Souvent, les romanciers imposent des conditions aux réalisateurs. Cela rend les adaptations ennuyeuses. Il faut faire des choix drastiques et surtout, traduire le roman dans son style de cinéaste. Un bon exemple, c’est Crash de David Cronenberg. 


Ta plus belle rencontre grâce à la littérature ?

J’ai eu la chance de déjeuner plusieurs fois avec Milan Kundera et nous avons aussi participé ensemble à une revue littéraire. Être accepté par des auteurs que j’admire, comme Milan Kundera, Michel Houellebecq, ou pouvoir dialoguer avec Patrick Modiano… je ne serai jamais blasé, c’est le privilège de l’écriture. Tu écris ton livre, tu le fais circuler comme une bouteille à la mer, et puis il y a des rencontres qui sont provoquées. Ce ne sont pas des rencontres superficielles, c’est parce que tu as écrit quelque chose qui a touché quelqu’un qui fait le même métier, et tout d’un coup, on se coopte entre nous, c’est génial.


Pour conclure, y a-t-il une littérature belge qui te plaît ?

François Weyergans est une référence absolue d’érudition, de finesse, de drôlerie, mais aussi de capacité à mettre des mots sur son malaise existentiel et à oser parler de son père, écrivain comme lui. Je remercie la Belgique de nous avoir donné ce grand autobiographe. 

1:22 uur MET Frédéric Beigbeder.

Frédéric Beigbeder reist regelmatig heen-en-weer naar Brussel om Le Philtre - zijn 100% natuurlijke biologische wodka - te promoten, en om zijn laatste roman Un barrage contre l’Atlantique voor te stellen. Wij maakten kennis met het ‘enfant terrible’ van de Franse literatuur, die zichzelf graag omschrijft als een “ietwat vermoeide grampie” sinds hij met zijn gezin in het Baskenland woont, ver van de drukte van het Parijse nachtleven.

Boris Rodesch nam de Thalys naar Parijs met Frédéric Beigbeder.

Voer je graag promotie?

Het woord is zeer valoriserend, ‘in promo’, zoals een vat waspoeder bij Auchan. Ik citeer liever André Gide, die zei: “Ik verwacht dat anderen mijn boek aan mij uitleggen”. Ik werk al drie jaar aan een zeer persoonlijk verhaal met een originele, bizarre vorm die volgens mij past binnen een bizarre wereld. Ik weet niet precies wat ik geschreven heb, en in feite zal de oefening van te luisteren naar reacties mij veel leren over mijn werk. Vanuit dat oogpunt is het veel interessanter. Het wordt een literaire conversatie.


Schrijver, literair criticus, publicist, televisiepresentator, radiocolumnist of regisseur. Wat is het verband tussen deze verschillende activiteiten?

In het begin is het journalistiek, het is schrijven. Er is een verschil in medium, maar het is altijd een kerel die alleen in zijn hoekje werkte en iets schreef. 


Op welke leeftijd ontdekte je het plezier van schrijven?

Toen ik acht was, kort na de scheiding van mijn ouders. Misschien was ik wel geen schrijver geworden als ze samen waren gebleven. De zin om te schrijven was er wanneer ik bij mijn vader was, om zeldzame momenten vast te leggen. Ik gebruik mijn boeken om het vluchtige te vereeuwigen. Het is vreemd, het verlangen om te schrijven kwam als een virus over me; weliswaar niet dat van China.


De eerste scène in je film L'idéal, waar een jongetje door een feestje wandelt omringd door modellen aan drugs.... Waren dat de nachten bij je vader?

Ja, hij hield feestjes waar ik dingen zag die je als kind niet hoort te zien. Ik had vaak het gevoel dat ik daar niet hoorde, maar tegelijkertijd was ik gefascineerd door de schoonheid van de Scandinavische modellen, topless in een Saint Laurent smoking; een heerlijk trauma.


Een heerlijk trauma dat je innerlijke feestgeest heeft aangestookt?

Ik dacht dat ik zo'n leven moest leiden om indruk te maken op mijn vader. Toch was hij niet echt een feestbeest, hij omringde zich gewoon graag door mensen en hield van mooie meisjes in zijn huis. Achteraf zie ik het geheel als iets buitengewoons, maar ook wel als iets ongezond. Ik herinner me het restaurant Chez Guy waar iedereen op de tafels danste. Als je acht of negen jaar oud bent, denk je “te gek, ze hebben plezier”, maar ik voelde me alsof ik de volwassene was. Het was een vreemd gevoel. 


Als student aan Sciences Po organiseerde je feestjes als stichtend voorzitter van de ‘Club des analphabètes cons mais attachants’ (N.v.d.v.: Club van domme maar beminnelijke analfabeten) ‘Caca's club’, waar je onder anderen Thierry Ardisson ontmoet. Dit leidt tot je eerste televisieoptredens op Paris Première...

Het gebeurde allemaal snel achter elkaar. Ik ben afgestudeerd aan Science Po, en uiteindelijk hebben ze me nooit naar mijn diploma's gevraagd. Ik werd feestorganisator in Caca's Club, en van de ene dag op de andere was ik beroemd, als een reality-tv-sterretje dat beroemd wordt zonder iets te hebben gedaan.


Ook omdat je de ‘crème de la crème’ van het Parijse nachtleven en de media wist aan te trekken?

Over Caca's Club werd overal gesproken, op TV, in de kranten. Ik werd de belichaming van de Parijse socialite roddels. Ik werd een nacht columnist die de Parijse nachten versloeg voor Globe magazine. Ardisson nodigde me uit in zijn tv-programma; en toen schreef ik op mijn vierentwintigste mijn eerste roman. Ik had enorm veel geluk. Ik frequenteerde mensen die me een persoonlijkheid vonden. Jean Edern Hallier, Thierry Ardisson, Bernard-Henry Lévy. Intellectuelen die een jonge, licht excentrieke kerel zagen en hem onmiddellijk een baan als schrijver gaven. Dat is gekkenwerk! Ik woonde de redactievergaderingen van Le Globe bij met Pierre Bergé, Jean-Paul Enthoven, Gilles Hertzog, enz. Eigenlijk wou ik niet bewust deel uitmaken van dit literaire milieu; ik ben er op natuurlijke wijze in gerold en helemaal niet via de klassieke, serieuze weg. Enkel door de poort van plezier en fiesta, maar toch ook van de geest. Veel minder dan mijn vriend Édouard Baer - die de briljantste van ons was - maar toch was er een ietwat intelligente uitwisseling, een beetje brutaal, tot amusement van die intellectuelen.

Wat zou je eigen kritiek op je roman ‘Un barrage contre l'Atlantique’ zijn?

Ik zou zeggen: wat probeerde die man te doen? Een boek met onsamenhangende zinnen en grote spaties… is Beigbeder lui? Probeert hij het aantal pagina's van zijn boek op te drijven en minder te werken? Vervolgens zou ik het over de progressie hebben. We komen binnen in de mist van iemands brein. We bevinden ons duidelijk in zijn schedel; er zijn landschappen, terugkerende herinneringen, een man die verdwaald is omdat de wereld stilstaat; hij niet begrijpt wat er aan de hand is en zijn toevlucht zoekt in het verleden. 


Zou de criticus een inspanning qua vorm opmerken?

Dank u voor de suggestie. In al mijn boeken stel ik mezelf deze vraag over de vorm, ik zoek naar een ietswat nieuwe structuur. We leven in een zeer hectische, chaotische wereld en ik probeer boeken te maken die binnen de tijdsgeest passen. Ik heb met belangstelling opgemerkt dat jongeren het moeilijk hebben met Oorlog en vrede van Leo Tolstoj of Op zoek naar de verloren tijd van Marcel Proust. In plaats daarvan lezen ze de hele dag door sms'jes en tweets. Als een roman hen met korte zinnen kon aanspreken en hen in een verhaallijn en flow kon betrekken, zou dat geweldig zijn. We moeten nieuwe vormen van romans uitvinden voor een nieuwe tijd.


Je hebt er ook voor gekozen om je literaire dubbelspel opzij te zetten en de ik-vorm te gebruiken. Het resultaat is een grote oprechtheid!?

In een autobiografisch verhaal moet je oprecht zijn en de afstand tussen jezelf en wat je schrijft zo klein mogelijk houden. Ik zeg niet dat ik daarin slaag; er zijn altijd onbewuste beschermingsmechanismen. Zelfs in zo'n persoonlijk verhaal zijn er leugens en bedrog. Ik verfraai waarschijnlijk dingen in een poging er op mijn best uit te zien.


Is het feit dat je dit laatste werk schreef nadat je uit Parijs verhuisde een reden voor het introspectieve karakter ervan? 

Deze stedelijke ballingschap heeft mijn leven volledig veranderd. Het boek weerspiegelt dat; er zijn veel meer landschappen, de natuur is aanwezig; en tegelijkertijd is het vreemd om te schrijven in een prachtig landschap terwijl de wereld volledig stilstaat ; weg met reizen, winkels, cafés, bioscopen… een maatschappij zonder maatschappij. Ik vond het allemaal erg deprimerend en melancholisch tijdens het schrijven van deze roman.

(N.v.d.r: De auteur woont met zijn vrouw en hun twee kleine kinderen in Guéthary maar schreef Le Barrage contre l'Atlantique in Cap Ferret).


Wat mis je het meest aan Parijs?

Als ik aankom, ga ik naar het Café de Flore om te kijken of er nog een geestige intelligentsia bestaat in deze fascinerende stad. Ik hou van die eindeloze gesprekken over het veranderen van de wereld zonder de daad bij het woord te voegen - die zijn er altijd geweest. Parijs is een schitterende stad, misschien een ijdeltuit, dat is waar, maar ik wilde deel uitmaken van die elite van gecultiveerde mensen die een goed discours houden en niet handelen; dat is waar ik van droomde. Ik ben blij dat ik de kans krijg om in contact te zijn met schrijvers, journalisten en filosofen, het is alsof ik in een club zit die mensen samenbrengt die niet al te dom zijn. Je kunt er natuurlijk de draak mee steken hoe belachelijk het allemaal is, ik ben de eerste om dat te doen, maar ondanks alles, als er één ding is dat ik mis in Parijs, dan is het dit. Ik hou van de momenten wanneer we iets drinken met deze romanschrijvers, waarin we praten over de toekomst van de literatuur en roddelen over onze collega's; het is een verrukkelijk genot (lacht).


Neem je het deze pandemie kwalijk dat ze niet alleen je 22-jarige dochter van een deel van haar jeugd berooft, maar je ook spijt doet krijgen van de jouwe?

Het is waar, een wereld zonder samenleving was iets onvoorstelbaars. We hadden nooit gedacht dat alles zomaar konden beëindigen. En dat met een verrassende, bijna universele onverschilligheid, met een soort volgzaamheid en gehoorzaamheid. Je kunt veel bereiken met de angst voor de dood. Ik veroordeel de regeringen niet, maar denk dat wij - de burgers - het zijn die deze bescherming eisen. De angst voor de dood is een vrij recent verschijnsel. We eisen van de machthebbers dat ze ons beschermen, zoals we van een moeder verlangen dat ze ons vertroetelt. We willen veilig zijn voor alle bedreigingen, of het nu gaat om gezondheid of terrorisme, we willen dat er geen auto-ongelukken meer gebeuren, we willen dat ons niets overkomt.


Toch, gezien de romanticus die je bent, was je niet positief verrast door zo'n economische stillstand?

Je moet naar het positieve kijken, het bewijst dat we het kunnen, en toch is het des te meer verbazingwekkend dat we niets doen aan de opwarming van de aarde. Wij doen veel voor een Chinees virus en heel weinig voor een veel grotere catastrofe die onverbiddelijk nadert.


Je beweert in dit verband dat "wij de vijand van de planeet zijn en dat het daarom ingewikkeld wordt om de planeet te redden en tegelijkertijd onszelf te redden"?

Het grootste probleem is de mens. Hij is het, die dieren doodt, de oceanen vervuilt, het klimaat opwarmt... Wat kunnen we doen, aangezien we niet willen verdwijnen? Er zijn twee zaken: ten eerste moeten we onze levensstijl veranderen, dat is waar de milieuactivisten het over hebben en ze hebben gelijk. Maar als dat niet genoeg is, moeten wij ons beschermen tegen de wraak van de aarde, want de cataclysmen zullen steeds frequenter worden, en daar heeft niemand het over.


Dit doet me denken aan Benoit Bartherotte, die je afschildert als een moderne Don Quichot in Un barrage contre l'Atlantique?

Al meer dan dertig jaar stort hij elke dag vrachtwagenladingen keien op de dijk voor zijn huis om Cap Ferret te beschermen tegen het stijgende water. Dit is helemaal niet milieuvriendelijk, maar het is een voorbeeld van wat we moeten doen benevens onze levensstijl veranderen: onszelf verdedigen. We zijn als parasieten geworden in een vijandige omgeving. Ik vind zijn dam dan ook eerder grandioos.


Op je eigen niveau, samen met je broer Charles en je jeugdvriend Guillaume Rappeneau, lanceerde je Le Philtre?

Al twintig jaar stel ik mezelf dezelfde vraag: hoe kunnen we hedonisme en ecologie met elkaar verzoenen? Op een avond zaten we op het strand van Guéthary te lamenteren over het feit dat consumptie gelijk is aan vernietiging en ecologie vaak synoniem is met gelatenheid. Zou het niet mogelijk zijn een wodka te consumeren zonder onze planeet te schaden? Philtre Organic Vodka was geboren. De boodschap is ook om te proberen ecologie feestelijk te maken. Verre van moraliserende toespraken, moet het leuk blijven.


Tien jaar feesten, tien jaar reclame, tien jaar mode en tien jaar media. Wat heb je te danken aan deze verschillende ervaringen?

Ze hebben mijn boeken gevoed. Ze hebben me ook de kans gegeven om de nieuwe krachten van de reclame, de mode en de humor te verkennen. De macht van humoristen is immens, zij zijn tegenwoordig de enigen die alles mogen bekritiseren zonder dat we het recht hebben om de bal terug te kaatsen.


Laten we teruggaan naar de literatuur: In 99 francs zei je, "Ik schrijf dit boek om ontslagen te worden". Op France Inter schreef je je laatste column, of liever je schreef ze niet, omdat je wist dat je met ontslag bedreigd werd. Is het uiteindelijk je pen die je saboteert?

Ja, het is alsof elke keer als iemand me een baan aanbiedt, ik zin heb om een lastpost te zijn. Ik verzeker mezelf dan door me voor te stellen als een klokkenluider, een getuige die achter de schermen kijkt, dat is mijn alibi, maar in werkelijkheid ben ik meer een leerling die ongehoorzaam is, het is vreemd. Misschien wil ik ook onbewust, elke keer als ik een baan te serieus neem, mezelf ervan bevrijden.


Na je ontslag bij France Inter hekelde je een zekere ‘lachtirannie’, veroorzaakt door het besluit van de media om van de wereld een reuzengrap te maken. Omdat je volgens jou niet om alles kunt lachen?

Alleen als het grappig is. Het probleem is dat er humoristen zijn die niet grappig zijn en functionarissen van de lach worden. Wat me schokt is niet de humor, maar het geforceerde gelach. Je moet de hele tijd lachen, zoals de griezelige clowns die een lachend gezicht hebben maar eng zijn in griezelfilms. Ik begrijp dit geforceerd geprogrammeerd gelach niet. Je moet grappig zijn van 8.56 tot 8.59. Sommigen zijn daar heel goed in, ze verzinnen iets, je luistert ernaar, je hebt het gevoel dat je gelachen hebt, maar je bent slechts getuige geweest van een min of meer briljante stijloefening. Ik had echter geen idee dat het zo'n groot taboe was en onbespreekbaar was. Dat gesprek heb ik echter nooit kunnen voeren; er is geen gevoeliger mens dan een humorist. Je kunt een schrijver belachelijk maken en drie dagen later kust hij je. Als je een komiek durft te bekritiseren, zit je levenslang in de hoek. Komedianten hebben geen gevoel voor humor.


Als je het verschil moest aanduiden tussen het werk van een schrijver en dat van een regisseur?

Het is de eenzaamheid. Wanneer zo'n 60 mensen je helpen een verhaal te vertellen, is dat niet hetzelfde als in je eentje op de top van Cap Ferret zinnen zitten opschrijven om te proberen je herinneringen om te zetten in iets blijvends.


Wat maakt een goede verfilming?

De regisseur moet de roman verraden en zich toe-eigenen. Vaak stellen de romanschrijvers voorwaarden aan de regisseurs. Dat maakt de bewerkingen saai. Je moet drastische keuzes maken en vooral de roman vertalen naar de eigen stijl van de filmmaker. Een goed voorbeeld is Crash van David Cronenberg. 


Je mooiste ontmoeting dankzij de literatuur?

Ik had het geluk verschillende keren te lunchen met Milan Kundera, en we hebben ook samen deelgenomen aan een literair tijdschrift. Auteurs die ik bewonder, zoals Milan Kundera of Michel Houellebecq, accepteerden me en ik kon een dialoog voeren met Patrick Modiano. Ik zal nooit blasé zijn, dat is het voorrecht van het schrijven. Je schrijft je boek, laat het dobberen als een fles in de zee, en ontmoetingen komen vanzelf. Dit zijn geen oppervlakkige ontmoetingen, ze komen tot stand omdat je iets geschreven hebt dat iemand heeft geraakt die hetzelfde beroep uitoefent, en plotseling werk je met elkaar samen, dat is briljant.


Tot slot, is er Belgische literatuur waar je van houdt?

François Weyergans is een absolute referentie in eruditie, finesse, gevatheid, maar ook in het vermogen om zijn existentieel onbehagen onder woorden te brengen en te durven spreken over zijn vader, die net als hij schrijver was. Ik dank België dat het ons deze geweldige autobiograaf heeft geschonken.