1h22 avec Agnès Jaoui
Writer // Boris Rodesch - Photography // Sébastien Van de Walle
Comédienne, réalisatrice, scénariste et chanteuse, Agnès Jaoui est une artiste complète, une femme libre et engagée, qui a formé avec Jean-Pierre Bacri l’un des couples les plus mythiques du cinéma français. À 59 ans, la cinéaste féminine la plus récompensée aux César vient de recevoir un César d’honneur pour l’ensemble de sa carrière.
Boris Rodesch a pris l’Eurostar avec Agnès Jaoui.
Dans La vie de ma mère, vous interprétez avec brio une maman bipolaire. Ça me rappelle Emmanuelle Devos qui déclarait dans cette même chronique : « Passé 55 ans, on nous propose essentiellement des rôles de femmes méchantes ou cinglées ».
C’est drôle, mais ce n’est pas vrai pour moi. On ne m’a d’ailleurs jamais proposé un rôle de femme méchante, mais j’aimerais bien.
Vous avez fait partie du Collectif 50/50, qui vise, entre autres, à faire évoluer la place des femmes dans le 7e art. Sentez-vous une évolution ?
Bien sûr, et cette évolution va dans le bon sens. Même si personnellement, en ce qui concerne la représentativité des femmes de plus de… quinze ans, parce que franchement, on vieillit très vite au cinéma… je n’ai pas à me plaindre puisqu’en vieillissant, je reçois plutôt plus de propositions intéressantes. Mais en réalité, si plus d’une femme sur deux a plus de 50 ans en France, selon une étude, sur l’ensemble des films français sortis au cinéma en 2021, seuls 7 % des rôles avaient été attribués à des actrices âgées de plus de 50 ans. C’est pareil pour les réalisatrices. Delphine Ernotte — présidente de France Télévisions — a d’ailleurs mis en place des quotas pour les femmes. Résultat, les hommes se sentent menacés et je les entends dire qu’on ne parle plus que de ça. C’est inquiétant et surtout, on a toujours l’impression que ces prises de conscience féministes sont les premières, alors que si on s’intéresse à l’histoire du féminisme, on réalise qu’il y a déjà eu plein de mouvements féministes, mais qu’ils ont à chaque fois été étouffés.
Et le simple fait qu’on en parle encore souligne aussi que le problème persiste.
Exactement, même si c’est normal d’en parler parce que c’est en train de changer, mais quand j’entends la colère de certaines personnes, cela me fait penser qu’il y a un monde qui évolue et un autre pas du tout. Idem pour le harcèlement ou les abus sexuels. Il y a un monde plutôt de gauche qui fait le ménage, et en parallèle, vous réalisez que Morandini — NDLR : le journaliste poursuivi pour harcèlement sexuel à l’encontre d’un jeune comédien — est toujours présent sur le plateau de CNews. Il faut se méfier de ces microcosmes qui font penser que l’on avance à grands pas, alors que le reste de la société ne semble pas du tout d’accord avec ces avancées. Je préfère donc être vigilante, car les risques de retour en arrière restent bien réels, malgré l’aveuglement de nos « petits milieux ». Cela fait, par exemple, plusieurs fois que l’on se dit que l’extrême droite ne va pas passer ou que Netanyahu ne sera pas réélu, et on se trompe à chaque fois.
Pour revenir à votre actualité, La vie de ma mère est le premier film du réalisateur Julien Carpentier. C’est important pour vous de travailler avec de jeunes cinéastes ?
Je ne me pose pas ce genre de question. J’accepte juste de jouer dans des films qui me plaisent. Et c’est souvent immédiat. Si j’ai besoin de relire le scénario, c’est que je ne vais pas le faire. Pour Le dernier des juifs de Noé Debré, ou La vie de ma mère de Julien Carpentier… Il se trouve que ces deux jeunes cinéastes sont venus vers moi avec des projets fabuleux.
Une nouvelle génération dont vous appréciez le côté « Rock’n’roll » ?
Je la regarde avec un regard confiant. La jeunesse est toujours passionnante, y compris dans sa naïveté ou dans son idéalisme. J’aime leurs remises en question et notamment celles sur le genre, qui, pour le coup, ne s’arrêtent pas à certains microcosmes. Dans les villes ou les campagnes, il y a des garçons qui se sentent filles et inversement, ou des garçons et des filles qui ne se sentent ni l’un ni l’autre. Cette remise en cause de l’assignation, je la trouve fascinante. Voir des garçons avec des jupes ou du vernis sur les ongles, c’est une vraie liberté qui, même si la transidentité a toujours existé, me paraît nouvelle. Le fait que ce mouvement ne se produise pas seulement dans un microcosme élitiste est également plutôt marrant. C’est aussi troublant et compliqué pour beaucoup de gens, mais c’est passionnant. En revanche, je ne suis pas du tout d’accord avec la « cancel culture » — NDLR : la « cancel culture » désigne la pratique de dénoncer publiquement ou de boycotter une personne ou une entreprise pour une attitude, un fait ou un propos jugé scandaleux, en particulier sur les réseaux sociaux. Je me souviens avoir eu une discussion sur « l’affaire Depardieu » avec un garçon de 17 ans. Il m’avait dit : « J’espère que dans 50 ans, nos héros seront moins dégueulasses que ce mec-là ». J’ai alors tenté de lui expliquer que, oui des comportements dégueulasses et impardonnables avaient été mis à jour, mais que ça ne l’empêchait pas d’être un merveilleux acteur, et surtout qu’en gros, des gens qui sont aussi purs dans leur vie que dans leur œuvre, ça n’existait pas. Quand on est jeune, on croit trop souvent que les gens intelligents sont toujours intelligents, alors qu’il y a des gens très intelligents dans un certain domaine, mais complètement cons ailleurs… C’est très enfantin et puéril de vouloir une cohérence absolue chez une personnalité, qu’elle soit publique ou anonyme.
Peut-on affirmer que les hypocrisies, les silences ou les protections font partie intégrante de « la machine » du cinéma français ?
Mais de toutes les machines ! Et ces hypocrisies ne sont pas nécessairement conscientes. C’est ça qui est fascinant dans les prises de conscience des sociétés et les évolutions. Prenez le colonialisme : pendant longtemps, il ne posait aucun problème de conscience. Idem pour le sexisme, ça ne posait aucun problème que les femmes ne soient pas considérées comme l’égal des hommes ou que ces derniers puissent se taper des petites jeunes. Cela me ramène à « l’affaire Depardieu » et à cette idée du monstre sacré. Les mots désignent finalement très bien les choses, puisqu’il était un monstre et qu’il était sacré. Or, je pense que rien ni personne ne devrait être sacré. Je me trompe peut-être, mais pour l’avoir croisé deux fois, je crois que c’est un homme qui a toujours cherché les limites et qui n’en avait plus. C’est là que l’entourage et le milieu du cinéma sont coupables. Il suffit de voir comme certaines personnes peuvent être fascinées par les caprices d’une star. Les gens aiment qu’il y ait un chef, ils éprouvent même le besoin de les créer pour pouvoir ensuite les démonter.
Si l’on revient aux sources... Vous grandissez avec un papa anticonformiste, qui se range toujours, presque par principe, du côté des opprimés. Votre caractère libre et engagé est-il, d’une certaine façon, un héritage familial ?
Évidemment, parce que j’ai toujours vu mon père engagé. Je l’accompagnais déjà petite à des manifestations, et quand je lui demandais s’il n’avait pas peur, il me répondait que c’était justement la raison pour laquelle il fallait y aller. Depuis, à chaque fois que j’ai peur, je me dis qu’il faut y aller. C’est l’un des nombreux principes fondamentaux que mes parents m’ont transmis.
Quel est, à ce jour, le combat qui vous tient le plus à cœur ?
La paix dans le conflit israélo-palestinien.
En évoquant votre enfance passée dans une famille juive tunisienne — qui vivait en Tunisie avant votre naissance — vous dites que vous ne vous considériez pas vraiment française en France, et pas vraiment « pas française » en Tunisie… Le fait que vous vous soyez justement si souvent sentie « en marge » vous a-t-il aidée à vous positionner comme une observatrice du monde, valeur essentielle dans vos différents métiers ?
Sûrement, même si c’était parfois douloureux parce que quand on est jeune, on a envie d’être comme tout le monde. Mais je ne me suis jamais vraiment sentie d’un côté ou d’un autre et c’est encore le cas aujourd’hui. En tant que productrice, j’essaie de comprendre les réalisatrices ; comme réalisatrice, les scénaristes ; et comme scénariste, les actrices… Ce souci de toujours vouloir comprendre l’autre me vient probablement du fait que je me suis si souvent sentie en marge.
Si on résume brièvement votre formation, vous étudiez au lycée Henri IV à Paris et commencez en parallèle les cours Florent à 14 ans, avant de vous inscrire au théâtre des Amandiers.
Il faut aussi ajouter le théâtre national de Chaillot avec Stuart Seide et la musique et le chant au conservatoire, quand j’avais 17 ans. Je dois ma formation à l’addition de toutes ces expériences, et de ces errances aussi, parce que croyez-moi que quand j’étais à mon sixième cours de théâtre et que j’avais un casting tous les dix ans, je ne me disais pas que je suivais une formation cohérente. Je cherchais juste à ne pas dépérir, et c’est là que la musique et le chant m’ont fait tellement de bien. Au final, je ne saurais pas dire ce qui a été le plus déterminant.
À 22 ans, vous partagez une première fois les planches avec Jean-Pierre Bacri pour la pièce de théâtre L’Anniversaire. Une rencontre décisive, avec un homme qui va vous faire chavirer, tant sur le plan sentimental que professionnel…
Au départ, je tombe surtout amoureuse de l’homme. Je ne connaissais pas si bien l’artiste. J’ai surtout été scotchée par sa liberté totale, par son goût certain et le fait qu’il n’avait pas peur de déplaire. Ça m’a aussi particulièrement fait du bien à une époque où je voulais surtout plaire. Ce qui m’a séduite, c’est qu’il puisse s’en foutre à ce point de son image. Peu importe qu’il soit en face du roi du pétrole ou d’un clochard, sa réaction était la même. C’est l’homme le plus courageux que j’ai rencontré. Il est arrivé avec une autre législation, d’autres lois qui m’ont immédiatement plu et qui m’ont aussi permis de couper le cordon avec mes parents, ce qui était essentiel pour pouvoir grandir.
Au début des années 1990, vous écrivez une première pièce de théâtre ensemble, Cuisine et dépendances. Quel a été le déclic qui vous a poussés à écrire à quatre mains ?
Le chômage (rires). Jean-Pierre avait déjà écrit des pièces dix ans auparavant, il avait déjà un savoir-faire. De mon côté, j’écrivais dans mon journal et j’étais surtout complètement angoissée de ne pas travailler. C’est horrible pour une actrice de devoir attendre le prochain casting. À l’époque, tout ce que je voulais, c’était être sur scène. J’avais déjà envie de jouer de bons rôles, mais je tenais surtout à jouer. Peut-être que si on m’avait proposé des tas de rôles dès mes 20 ans, je ne me serais pas mise à écrire si vite. Jean-Pierre n’était pas non plus à un moment faste de sa carrière. Nous étions aussi très énervés par plein de choses qu’on entendait à la télévision. On n’était pas d’accord avec la majorité et nous refusions l’idée qu’elle ait nécessairement raison. Ces agacements profonds nous ont poussés à écrire.
Aujourd’hui, vous dites justement que parce que vous avez moins de certitudes qu’à l’époque, c’est devenu plus difficile d’écrire ?
Disons que mes avis sont moins tranchés et que j’ai plus de compréhension pour la faiblesse humaine ou la lâcheté. Cela dit, l’envie d’écrire me démange à nouveau. Il y a des sujets qui me mettent très en colère et j’ai besoin de les exprimer.
Pouvez-vous nous en dire davantage ?
J’écris pour le cinéma, mais je ne vous en dirai pas plus.
Au-delà de vos 7 statuettes aux César ou de votre Magritte d’honneur, vous avez également reçu — avec Jean-Pierre Bacri — le prix du scénario au Festival de Cannes pour Comme une image… Quelle a été la plus belle de vos récompenses ?
C’est le Molière de l’auteur que nous avons reçu pour Cuisine et dépendances. Nous n’avions encore rien écrit à deux, c’était le point de départ, notre toute première récompense.
Si on fait le bilan de votre carrière de cinéaste, vous avez réalisé 5 longs-métrages et écrit une dizaine de scénarios. Comment définiriez-vous votre cinéma ?
Nos films avec Jean-Pierre ont plusieurs points communs. Comme celui de toujours insister sur la difficulté de changer de milieu ou de pouvoir changer son regard sur les choses pour mieux comprendre l’autre. Généralement, on commence nos vies avec une empreinte sociopsychologique très forte qu’on ne remet pas en cause. Alors bien sûr, il y a le passage à l’adolescence, où l’on déteste ou non ses parents, mais autrement, on considère cet « héritage familial » comme étant la vérité. Ensuite, il y a ces moments où l’on remet en question ces valeurs transmises, parce qu’on tombe amoureux, qu’on est en dépression, qu’on suit une thérapie… On commence alors à reconsidérer certaines choses ou à changer de point de vue, et c’est ça qui me passionne. Dans nos films, on essaie aussi de faire émerger des voix ou des personnages qu’on n’entend pas et qui ne sont pas mis en valeur. Personnellement, je suis fêtée toute la sainte journée alors que des aides-soignants, des militantes ou des gens du Secours populaire le mériteraient davantage. J’ai toujours eu cette envie de mettre en lumière toutes les personnes qui agissent par bonté intrinsèque sans jamais avoir éprouvé le besoin, comme moi, de se retrouver sur le devant de la scène.
Pour conclure, quel serait votre conseil aux jeunes artistes ?
Qu’ils osent être fidèles à leur point de vue et à leur petite flamme intérieure. Ils doivent se faire confiance et surtout, persévérer.
Actrice, regisseur, scenarioschrijver en zangeres ... Agnès Jaoui is een allround artieste, een vrije en toegewijde vrouw en vormde samen met Jean-Pierre Bacri een van de meest legendarische koppels in de Franse cinema. Ze is de vrouwelijke filmmaker met de meeste Césars op haar naam en onlangs heeft ze op 59-jarige leeftijd de ere-César voor haar hele carrière mogen ontvangen.
Boris Rodesch nam samen met Agnès Jaoui de Eurostar.
In La vie de ma mère zet je op briljante wijze een bipolaire moeder neer. Het doet me denken aan Emmanuelle Devos, die in deze zelfde column zei: “Zodra we de 55 gepasseerd zijn, krijgen we vooral rollen als slechte of gestoorde vrouwen”.
Hoewel dit grappig is, geldt dit niet voor mij. Ze hebben me trouwens nooit een rol van een slechte vrouw aangeboden, ook al zou ik dat wel leuk vinden.
Je maakte deel uit van het Collectif 50/50, dat onder andere de plaats van vrouwen in de zevende kunst wil veranderen. Heb je het gevoel dat dit ook daadwerkelijk aan het veranderen is?
Jazeker, en deze verandering gaat de goede kant op. Hoewel, als ik naar mezelf kijk als het gaat om de vertegenwoordiging van vrouwen ouder dan ... vijftien (want eerlijk gezegd worden we heel snel oud in de filmwereld) dan mag ik niet klagen, want naarmate ik ouder word, krijg ik interessantere aanbiedingen. Maar kijken we naar de realiteit, dan zien we dat meer dan één op de twee vrouwen in Frankrijk ouder is dan 50. En volgens een onderzoek werd van alle Franse films die in 2021 werden uitgebracht, slechts 7% van de rollen gegeven aan actrices die ouder waren dan 50 jaar. En dat geldt ook voor vrouwelijke regisseurs. Delphine Ernotte (voorzitter van France Télévisions) heeft dan ook quota voor vrouwen ingevoerd. Als gevolg daarvan voelen mannen zich bedreigd en hoor ik ze zeggen dat dit het enige is waar nog over gepraat wordt. Dat is verontrustend en bovenal hebben we altijd de indruk dat deze feministische bewustwordingen nieuw zijn. Maar kijk je naar de geschiedenis van het feminisme, dan realiseer je je dat er echt wel veel feministische bewegingen zijn geweest, maar dat ze altijd in de kiem gesmoord zijn.
En alleen al het feit dat we er nog steeds over praten, benadrukt dat het probleem er nog steeds is.
Precies, ook al is het normaal om erover te praten omdat dingen veranderen. Maar als ik dan de woede van bepaalde mensen hoor, geeft het me het idee dat er een wereld is die evolueert en een andere die dat helemaal niet doet. Hetzelfde geldt voor seksuele intimidatie en misbruik. Er is een nogal linkse wereld die bezig is met een reorganisatie, maar tegelijkertijd realiseer je je dat Morandini (NVDR: de journalist die vervolgd werd voor seksuele intimidatie van een jonge acteur) nog steeds aanwezig is op de set van CNews. We moeten op onze hoede zijn voor deze microkosmos die ons laat denken dat we grote vooruitgang boeken, terwijl de rest van de samenleving het helemaal niet eens lijkt te zijn met deze vooruitgang. Ik ben dus liever waakzaam, want de risico’s van achteruitgang blijven zeer reëel, ondanks de blindheid van onze “kleine kringen” waarin we ons bewegen. We hebben nu bijvoorbeeld al verschillende keren gezegd dat extreemrechts niet zal winnen of dat Netanyahu niet herkozen zal worden, en we hebben het elke keer mis gehad.
Om terug te komen op je nieuwe film: La vie de ma mère is de eerste film van regisseur Julien Carpentier. Is het belangrijk voor je om met jonge filmmakers te werken?
Ik stel me dat soort vragen niet. Ik neem alleen rollen aan in films die ik leuk vind. En dat is vaak meteen al duidelijk. Als ik het script twee keer moet lezen, dan doe ik de film niet. Voor Le dernier des juifs van Noé Debré, of La vie de ma mère van Julien Carpentier wilde het toeval dat deze twee jonge filmmakers naar mij toe kwamen met fantastische projecten.
Een nieuwe generatie van wie je de rock-’n-roll-kant waardeert?
Ik kijk hier vol vertrouwen tegenaan. De jeugd is altijd boeiend, zelfs in haar naïviteit en idealisme. Ik hou ervan dat ze alles ter discussie stellen, en dan vooral de discussies over het gender, die zich niet beperken tot een bepaalde microkosmos. In de stad en op het platteland zijn er jongens die zich een meisje voelen en andersom, of jongens en meisjes die zich geen van beiden voelen. Dit ter discussie stellen van iemand in een hokje plaatsen vind ik fascinerend. Jongens met rokjes zien of met nagellak is een echte vrijheid die, hoewel transidentiteit altijd heeft bestaan, nieuw lijkt voor mij. Het feit dat deze beweging niet alleen in een elitaire microkosmos plaatsvindt is ook best grappig. Het is ook verwarrend en ingewikkeld voor veel mensen, maar wel boeiend. Aan de andere kant ben ik het helemaal niet eens met de zogenoemde ‘cancelcultuur’ (NVDR: de ‘cancelcultuur’ verwijst naar de praktijk van het publiekelijk aan de kaak stellen of boycotten van een persoon of bedrijf vanwege een houding, feit of opmerking die als schandalig wordt beschouwd, met name op social media). Ik herinner me een discussie die ik heb gehad over de Depardieu-affaire met een 17-jarige jongen. Hij zei: ”Ik hoop dat onze helden over 50 jaar niet zo walgelijk zijn als deze man”. Ik heb geprobeerd hem uit te leggen dat er inderdaad walgelijk en onvergeeflijk gedrag aan het licht was gekomen, maar dat dit hem er niet van weerhield een geweldige acteur te zijn en vooral dat er eigenlijk niet zoiets bestaat als mensen die net zo puur zijn in hun leven als in hun werk. Als je jong bent, denk je vaak dat intelligente mensen altijd intelligent zijn, terwijl er in feite mensen zijn die op een bepaald gebied heel intelligent zijn, maar op een ander gebied erg stom ... Het is heel kinderachtig en onnozel om absolute consistentie te willen in een persoonlijkheid, of die nu publiekelijk of anoniem is.
Kunnen we zeggen dat hypocrisie, stilzwijgen en bescherming allemaal deel uitmaken van de Franse ‘filmmachine’?
Van alle machines! En dit soort hypocrisie is niet per se bewust. Dat is wat zo fascinerend is aan het bewustzijn van de maatschappijen en de evolutie. Neem het kolonialisme dat lange tijd geen gewetensprobleem vormde. Idem voor het seksisme, het was geen probleem dat vrouwen niet als gelijke van mannen werden beschouwd, of dat mannen seks hadden met jonge meisjes. Dit brengt me weer terug bij de Depardieu-affaire en het beeld van een heilig monster. Uiteindelijk beschrijven deze woorden de dingen heel goed, want hij was een monster en hij was heilig. Maar ik ben van mening dat niets en niemand heilig zou moeten zijn. Ik kan het mis hebben, maar ik heb hem nu twee keer ontmoet en ik denk dat hij een man is die altijd de grenzen heeft opgezocht en dat hij die nu niet meer heeft. Daar zijn de entourage en de filmwereld schuldig aan. Je hoeft maar te kijken naar hoe gefascineerd sommige mensen kunnen zijn door de grillen van een ster. Mensen hebben graag een leider, ze voelen zelfs de behoefte om hem te creëren om er vervolgens niets meer van heel te laten.
Even terug naar de bron ... Je groeide op met een non-conformistische vader die, bijna uit principe, altijd de kant van de underdog koos. Is je vrije en betrokken aard in zekere zin een erfenis van je familie?
Natuurlijk, ik heb mijn vader nooit anders dan betrokken gezien. Als kind ging ik al met hem naar demonstraties en als ik hem dan vroeg of hij niet bang was, zei hij dat dat precies de reden was waarom hij moest gaan. Sindsdien zeg ik steeds als ik bang ben tegen mezelf dat ik moet gaan. Het is een van de vele basisprincipes die mijn ouders aan me hebben doorgegeven.
Wat is tot nu toe het gevecht dat je het meest na aan je hart ligt?
Vrede in het Israëlisch-Palestijnse conflict.
Als we het hebben over opgroeien in een Tunesische en joodse familie (die in Tunesië woonde voordat je werd geboren), zeg je dat je jezelf niet echt als Frans beschouwde in Frankrijk, en niet echt als ‘niet-Frans’ in Tunesië ... Heeft het feit dat je je vaak aan de zijlijn voelde staan je geholpen om jezelf te positioneren als waarnemer van de wereld, een essentiële waarde in je verschillende werkzaamheden?
Ongetwijfeld, ook al was het soms pijnlijk, want als je jong bent wil je net als iedereen zijn. Maar ik heb me nooit echt als iemand van de ene of de andere kant gevoeld, en dat is vandaag de dag nog steeds zo. Als producent probeer ik de regisseurs te begrijpen, als regisseur de scriptschrijvers, en als scriptschrijver de actrices ... Deze behoefte om anderen altijd te begrijpen komt waarschijnlijk voort uit het feit dat ik me zo vaak aan de zijlijn heb voelen staan.
Als we je opleiding kort samenvatten, studeerde je aan het Lycée Henri IV in Parijs en tegelijkertijd begon je op 14-jarige leeftijd aan de Cours Florent, voordat je je inschreef bij het Théâtre des Amandiers.
Vergeet ook niet het Théâtre National de Chaillot met Stuart Seide en muziek en zang op het conservatorium toen ik 17 was. Ik heb mijn opleiding te danken aan de som van al deze ervaringen, en ook aan deze omzwervingen, want geloof me, toen ik bezig was aan mijn zesde acteeropleiding en ik om de tien jaar een casting had, dacht ik niet dat ik een samenhangende opleiding volgde. Ik probeerde gewoon niet weg te kwijnen, en daarom deden de muziek en zang me zo goed. Uiteindelijk kan ik niet zeggen wat de meest doorslaggevende factor was.
Op 22-jarige leeftijd stond je voor het eerst samen met Jean-Pierre Bacri op de bühne in het toneelstuk L’Anniversaire. Een beslissende ontmoeting met een man die je omver zal blazen, zowel op romantisch als professioneel vlak ...
Aanvankelijk werd ik vooral verliefd op de man. Ik kende de artiest niet zo goed. Ik was vooral onder de indruk van zijn totale vrijheid, zijn zekere smaak en het feit dat hij niet bang was om onsympathiek over te komen. Ook dit deed mij in een tijd waarin ik vooral probeerde mensen te behagen bijzonder goed. Wat mij met name aansprak was dat hij niets gaf om zijn imago. Het maakte niet uit of hij te maken had met een oliegigant of een zwerver, zijn reactie was hetzelfde. Hij is de moedigste man die ik ooit heb ontmoet. Hij kwam met een andere wetgeving, met andere wetten die me meteen bevielen en die me ook in staat stelden de band met mijn ouders te verbreken, wat essentieel was om volwassen te worden.
Begin jaren negentig schreven jullie samen jullie eerste toneelstuk, Cuisine et dépendances. Wat was de aanleiding dat jullie besloten om samen te schrijven?
Werkloosheid (lacht). Jean-Pierre had tien jaar eerder al toneelstukken geschreven, dus hij had al de nodige kennis. Ik schreef in mijn dagboek en maakte me zorgen dat ik geen werk had. Het is verschrikkelijk voor een actrice om te moeten wachten op de volgende casting. In die tijd wilde ik alleen maar op het toneel staan. Ik wilde toen al goede rollen spelen, maar ik wilde vooral acteren. Als ik op mijn 20e veel rollen aangeboden had gekregen, was ik misschien niet zo snel begonnen met schrijven. Jean-Pierre zat ook in een mindere periode van zijn carrière. We waren ook erg boos door veel dingen die we op televisie hoorden. We waren het niet eens met de meerderheid en weigerden te accepteren dat ze per definitie gelijk had. Deze diepgewortelde ergernissen zetten ons aan tot schrijven.
Zou je zeggen dat het nu moeilijker is geworden om te schrijven omdat je minder zekerheden hebt dan toen?
Laten we zeggen dat mijn meningen minder geprononceerd zijn en dat ik meer begrip heb voor menselijke zwakheid of lafheid. Dat gezegd hebbende, kriebelt het weer om te gaan schrijven. Er zijn onderwerpen die me erg boos maken en die ik moet uiten.
Kun je ons hier meer over vertellen?
Ik schrijf voor de film, maar meer vertel ik je niet.
Behalve je zeven César-beeldjes en je Magritte d’honneur, won je ook (samen met Jean-Pierre Bacri) de prijs voor het ‘Beste Scenario’ op het Festival van Cannes voor Comme une image ... Wat is je mooiste prijs ooit?
Dat is de Molière voor beste auteur die we ontvingen voor Cuisine et dépendances. We hadden nog niet eerder iets met z’n tweeën geschreven, dus dit was het startpunt, onze allereerste beloning.
Als we de balans opmaken van je carrière als filmmaker, dan heb je vijf speelfilms geregisseerd en een tiental scenario’s geschreven. Hoe zou je jouw films omschrijven?
Onze films met Jean-Pierre hebben verschillende punten met elkaar gemeen. Zoals bijvoorbeeld het altijd benadrukken van hoe moeilijk het is om van omgeving te veranderen of de manier waarop je naar dingen kijkt te kunnen veranderen om anderen beter te begrijpen. Over het algemeen beginnen we ons leven met een zeer sterke sociaal-psychologische stempel die we niet in twijfel trekken. En dan volgt natuurlijk de overgang naar de adolescentie, waarin je je ouders wel of niet haat, maar verder neem je deze ‘familie-erfenis’ aan als de waarheid. Dan zijn er van die momenten waarop je vraagtekens zet bij de waarden die je zijn aangeleerd, omdat je verliefd wordt, een depressie hebt, in therapie bent ... Dan begin je bepaalde dingen te heroverwegen of je standpunt te veranderen, en dat is wat me fascineert. In onze films proberen we ook de stemmen en personages naar voren te brengen die we niet horen en die niet tot hun recht komen. Persoonlijk word ik de hele dag bejubeld, terwijl verpleeghulpen, activisten en mensen van het Secours Populaire het meer verdienen. Ik heb altijd al de aandacht willen vestigen op alle mensen die handelen uit intrinsieke goedheid zonder ooit de behoefte te hebben gehad om, zoals ik, in de schijnwerpers te staan.
Tot slot, welk advies zou je jonge artiesten geven?
Dat ze trouw durven te blijven aan hun standpunt en aan hun kleine innerlijke vlam. Ze moeten zichzelf vertrouwen en vooral doorzetten.
Agnès Jaoui
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