Road to Tokyo
Writer // Boris Rodesch - Photography // Sébastien Van de Walle
Comment évoquer le lien qui unit l’athlétisme belge et les Jeux olympiques sans penser à la famille Borlée ? Si Olivia remportait une médaille d’or aux JO de Pékin en 2008, Kevin et Jonathan devraient participer en 2020 à leur quatrième olympiade consécutive tandis que Dylan, qui avait déjà rejoint les Belgian Tornados aux jeux de Rio, sera vraisemblablement, lui aussi, présent à Tokyo.
Rencontre avec les jumeaux Borlée chez Fonteyne à Woluwe-Saint-Pierre
Gamins, aviez-vous un modèle parmi les sportifs ?
Kevin Borlée : Nous n’avons jamais été fans d’un sportif en particulier même si nous avions un poster de Kobe Bryant dans notre chambre. Nous étions plutôt inspirés par nos parents et notre grande sœur.
Jonathan Borlée : Par contre, nous regardions déjà la Formule 1 à 3-4 ans et notre pilote favori était Michaël Schumacher.
À quel âge avez-vous commencé l’athlétisme ?
K.B : Nous avions 15 ans. Avant ça, nous avons joué au football et notre coach soulignait déjà nos prédispositions à la vitesse. Jonathan jouait défenseur central et j’évoluais sur les ailes.
Vous ne seriez jamais devenus athlètes si…
K.B : Si Olivia n’avait pas commencé.
J.B : Si on m’avait mis au volant d’une voiture plus tôt (rires). C’est un sport où nous suivons toutes les catégories et on essaie de piloter sur circuit dès qu’on en a l’occasion.
Quel est votre bilan de l’année 2019 ?
K.B : C’est un sentiment mitigé parce qu’on va chercher cette médaille de bronze avec le relais 4X400 aux championnats du monde, mais en même temps, le plaisir n’a pas toujours été présent. Jo se blesse et ne participe pas aux championnats du monde à Doha. De mon côté, je me suis blessé à la mi-saison et j’ai mis du temps à revenir. 2019 a vraiment été une année contrastée, nous n’avons pas pu savourer pleinement cette première médaille aux championnats du monde.
Avez-vous été impressionné par une performance d’un athlète belge en 2019 ?
K.B : La mentalité des sportifs belges de façon générale a fort évolué au cours des dernières années. Désormais, ils affirment plus facilement leur ambition. Après, ce n’est pas parce qu’on dit qu’on doit gagner qu’on va gagner, mais les sportifs doivent être ambitieux et mettre toutes les chances de leur côté pour performer et représenter notre pays le mieux possible. Prenez Philippe Gilbert ou encore les Diables rouges… aujourd’hui, ils veulent battre la France ou le Brésil. Le discours a changé même si c’est encore trop souvent mal pris en Belgique où l’on est vite considéré comme un dikkenek.
J.B : Les sportifs s’entrainent pour gagner. Nous devons être fiers et nous donner les moyens d’y arriver. Pour revenir à votre question, j’ai été très impressionné par la victoire en solitaire du cycliste Remco Evenepoel à la Clasica San Sebastian.
Le fait de vivre votre carrière en famille, ce n’est que du bonheur ou est-ce parfois aussi difficile à gérer ?
K.B : C’est difficile au niveau de la gestion des émotions dans le sport en général et c’est vrai que pour nous, le fait de ne pas devoir uniquement gérer sa carrière, mais aussi celle de ses frères et sœur ajoute une dimension particulière. Nous sommes très proches et dès que ça ne se passe pas comme on le voudrait pour l’un d’entre nous, cela nous touche très fort. L’attache sentimentale n’est pas du tout la même qu’avec nos autres coéquipiers, cela peut être une force ou un poids, mais ça fait partie de notre histoire et on a appris à le gérer.
2020 est une année olympique.
La préparation est-elle différente ?
J.B : Par rapport aux autres années où la routine a parfois tendance à s’installer, la motivation est ici différente. On va mettre toute notre énergie, sans calculer, pour essayer d’arriver au meilleur de notre forme à Tokyo.
K.B : L’objectif du début de saison est clair : nous tenons à nous qualifier aussi en individuel.
Votre sentiment lors de votre première qualification pour les JO de Pékin en 2008 ?
K.B : Cela reste l’un des meilleurs moments de notre carrière. Participer aux JO à 20 ans ! Nous réalisions déjà notre rêve. Nous avons en plus été performants puisque nous avons terminé en 5e position du relais 4x400. Ajoutez-y la médaille d’argent d’Olivia avec le relais 4X100. Ces premiers jeux étaient vraiment exceptionnels !
(NDLR : Les Belgian Tornados se classent finalement 4e et le relais 4X100 féminin récupère la médaille d’or suite à la disqualification des équipes russes.)
Avez-vous été marqués par une rencontre en particulier aux Jeux olympiques ?
J.B : En 2008, j’avais été très impressionné par l’équipe américaine de Basket-ball, mais aussi par le sprinter Usain Bolt et par le nageur Michael Phelps qui avaient tous les deux explosé lors de ces JO à Pékin. J’avais aussi été surpris de voir dans le village olympique des athlètes demander des signatures ou des selfies à ces légendes du sport. Je ne prétends pas avoir le même palmarès qu’eux, mais je nous considère tous comme une grande famille de sportifs. Dans ce contexte, le fait qu’une star comme Usain Bolt reste malgré tout dans le village était très classe. D’autres athlètes comme Federer ne veulent même pas y entrer et je peux les comprendre.
Un podium aux Jeux olympiques, c’est le rêve absolu ?
K.B : Les jeux n’ont lieu que tous les quatre ans. Nous avons donc X fois moins de chance d’y participer et d’aller chercher une médaille. Tout ce qui est rare coûte cher et cela demande évidemment beaucoup d’efforts.
Comment gérez-vous justement les sacrifices nécessaires pour mener une vie de sportif de haut niveau ?
K.B : Cela fait partie de notre quotidien depuis tellement longtemps, ce n’est pas toujours évident mais on trouve les clefs pour se remotiver, aller plus haut et essayer d’avancer avec des objectifs cohérents. C’est aussi pour cette raison que nous sommes toujours présents depuis 2008.
Pour conclure, à 31 ans, votre fin de carrière se rapproche. Pensez-vous déjà à votre reconversion ?
J.B : On y pense sans être focalisés là-dessus tout simplement parce qu’on a les JO en point de mire. Il n’y a que ça qui compte.
KEVIN ET JONATHAN BORLEE
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