1h22 avec Mara Taquin

Writer // Boris Rodesch - Photography // Sébastien Van de Walle

La comédienne, âgée de 25 ans, enchaîne les rôles dans des courts-métrages, des longs-métrages et des séries. Récemment à l’affiche du film belge La Rûche, mais aussi du film français Rien à foutre, cette jeune Bruxelloise qui crève l’écran est promise à un bel avenir dans le septième art.

Boris Rodesch a pris le Thalys
avec Mara Taquin

Tu viens souvent à Paris ?

Je fais au moins un aller-retour par semaine pour y passer des castings.

Plus jeune, Paris, ça évoquait quoi pour toi ?

Je ne quittais pas souvent Bruxelles. Ma grand-mère m’avait emmenée à Paris pour fêter mon anniversaire. Cette ville s’apparentait à une sorte de fantasme, un mythe, mais je n’aurais jamais pensé y aller aussi souvent, et encore moins pour travailler. C’est un vrai luxe.

Tu n’as jamais envisagé de t’y installer pour y vivre ?

Cela m’a traversé l’esprit car je suis consciente que c’est à Paris que ça se passe. Mais je tiens tellement à mon équilibre et à mes racines bruxelloises. J’ai besoin de ce point d’ancrage, c’est essentiel pour mon développement professionnel, et aussi pour prendre du recul par rapport au milieu du cinéma.

Ce que tu préfères à Paris ?

L’aspect culturel, il y a tellement de choses qui s’y passent. Quand tu y vas, tu essaies de te stimuler. Que ce soit pour aller voir des films qui ne sont pas en salle en Belgique ou écouter des concerts… J’essaie d’en profiter au maximum.

Quelle a été ta première claque de cinéma ?

Par réflexe, je dirais Thelma & Louise, mais je me souviens aussi avoir vu Ma vie en rose, un film belge réalisé par Alain Berliner. Il raconte l’histoire d’un petit garçon qui a des traits dits féminins pour la société. J’ai été marquée, car ce sujet précieux était aussi un thème avant-gardiste pour l‘époque.

À 17 ans, tu as été repérée par Camille Mol, lors d’un casting sauvage pour son film de fin d’études à l’IAD Créatures. Ta carrière a donc débuté sur une coïncidence…

C’est vraiment un joyeux hasard. En toute honnêteté, je n’avais jamais osé penser faire ce métier. Je suis tellement contente que Camille ait vu en moi quelque chose que je n’avais pas capté. Elle a décelé un côté lunaire et introverti que je ne connaissais pas nécessairement, qui ne fait pas partie de mon tempérament de base, et ça m’a permis de faire mon entrée au cinéma.

Quand te dis-tu pour la première fois : je vais en faire mon métier ?

Je ne me le suis jamais dit, c’est aussi une protection de se dire que ça peut s’arrêter à tout moment.

Même si aujourd’hui, ça ressemble fameusement à un début de carrière, j’y travaille et je m’y donne à fond, mais j’essaie de ne pas trop me dire que c’est mon métier. Je préfère penser que c’est une chance inouïe d’avoir pu vivre cette expérience, et que même si ça doit s’arrêter demain, c’est déjà énorme.

Tu as déjà enchaîné une trentaine de rôles… Financièrement, ça te permet d’en vivre ?

Depuis deux ans, oui. Mais je n’ai personne à charge, et il y a des moments où c’est vraiment la galère. Heureusement, mon mode de vie me le permet. Et puis, j’ai dix ans d’expérience dans l’horeca, donc si je dois retourner travailler dans les bars, je le ferai sans souci. Parfois, cette dynamique dans le travail avec des horaires fixes et une certaine légèreté me manque.

Si tu devais définir brièvement ton parcours d’actrice ?

Il y a donc eu ce premier rôle dans Creatures pour Camille Mol. Ensuite, j’ai joué dans la saison 2 d’Ennemi Public, qui m’a permis de rencontrer mon ancienne agente, Emmanuelle Bourcy. C’était idéal de débuter dans le milieu avec des gens si bienveillants. Et puis, il y a eu ce petit rôle dans le film Hors normes, réalisé par Olivier Nakache et Éric Toledano. Indépendamment du prestige de ces deux réalisateurs, à la lecture du pitch, c’était hors de question de passer à côté de ce rôle. Pouvoir jouer une éducatrice qui soutient les enfants atteints d’autisme, j’ai tout de suite pensé que ça avait du sens et que j’allais apprendre des choses concrètes. Il y a des gens qui passent leur vie à être éducateur spécialisé, et moi, j’ai eu la chance, à un moment donné, d’être prise en main par ces personnes magnifiques et de vivre leur quotidien. C’est aussi toute la beauté de ce métier. Dans la foulée, j’ai tourné dans Scorpex avec Vincent Cassel, La Rûche de Christope Hermans, Rien à Foutre avec Adèle Exarchopoulos, ou encore La Syndicaliste avec Isabelle Huppert. C’est super intéressant de réaliser que chaque cinéaste à sa façon de travailler. C’est à chaque fois une nouvelle équipe, un nouveau projet et un processus de travail différent auquel il faut s’adapter.

(NDLR : Scorpex est le premier épisode d’une série sur le confinement — 6 X Confiné.es — diffusée sur Canal +.)

Quel a été jusqu’ici le tournage le plus marquant de ta jeune carrière ?

Je dirais La Rûche, car c’était la première fois que j’étais impliquée de A à Z dans le processus de création du film. J’aime particulièrement le travail en amont d’un film. Cette recherche quotidienne, qui consiste à se renseigner et apprendre des choses, m’anime parfois plus que le tournage sur le plateau. Pour Rien à foutre, j’ai par exemple suivi une formation d’agente immobilière… c’est génial d’accumuler autant d’expérience pour chaque nouveau film.

Revenons à Hors normes, où tu donnais la réplique à de jeunes éducateurs et à des enfants atteints d’autisme… Cela relativise forcément le métier d’actrice ?

Complètement, j’ai pris une master class sur ce film. Quand tu « joues » avec des enfants atteints d’autisme, cela t’oblige à avoir une vraie écoute de la personne qui est en face de toi, et il n’y a aucun moment où tu essaies de réfléchir à ce que tu vas faire toi, tu te mets juste au service de la scène qui se déroule. En ce qui concerne les éducateurs, tu réalises qu’ils ont ton âge et qu’ils se lèvent tous les jours par altruisme, qu’ils se prennent des coups, mais qu’ils ont tellement d’amour à donner et à recevoir, le tout sans faire le moindre calcul. Je me souviens qu’en rentrant chez moi après le tournage, je me disais : je fais du cinéma, super, on va bien changer le monde comme ça… Cela dit, ça m’a forcée à me remettre en question et à comprendre aussi que mon métier pouvait mettre en lumière ces personnes-là. En effet, je ne fais pas du cinéma pour me mettre en lumière, mais plutôt pour souligner ce que les autres font.

À tes débuts, lorsque tu multipliais les castings à Paris, tu disais regretter que le cinéma soit encore un milieu très privilégié…

C’est vrai qu’au-delà du prix des billets de train ou des trajets en bus pour aller à Paris, il y a aussi le temps que les jeunes acteurs et actrices consacrent à ces nombreux castings. Tout ça pour passer une audition qui dure quinze minutes… J’ai la chance d’avoir des parents qui m’ont toujours soutenue moralement, mais je devais quand même bosser le soir pour pouvoir me payer mes allers-retours. Il y a beaucoup de jeunes comédiens qui doivent arrêter parce qu’ils n’ont pas d’autre choix, financièrement ce n’est pas possible, et dans ce sens, oui, le cinéma reste un milieu très privilégié. Heureusement, de mon côté, les planètes se sont vite alignées, je me suis fait un petit nom à Bruxelles et je n’ai jamais dû courir derrière les castings en espérant absolument obtenir un rôle.

As-tu justement une stratégie dans la construction de ta « carrière » ?

Ce sont très clairement des choix. Et si je dois retravailler dans la restauration pour les assumer, je le ferai sans hésiter. Du coup, avoir cette possibilité-là me permet de choisir mes films en fonction de mes intuitions. Si je sens un rôle, j’y vais ; dans le cas contraire, je préfère m’abstenir. J’ai vraiment envie de m’inscrire dans le cinéma. Et ce dont je suis certaine, c’est que je ne vais pas faire mille séries.

Pour quelles raisons ?

J’ai peur de rester figée dans un personnage. Et puis, en Belgique, contrairement aux séries anglaises, on ne se donne pas les moyens, on ne prend pas le temps nécessaire pour offrir aux personnages suffisamment de couches. J’accepterais volontiers de jouer dans des séries qui profitent d’un vrai budget, mais les séries belges, ça reste compliqué.

Dans une interview, tu déclarais ne pas vouloir être la marionnette des réalisateurs/trices… Cela signifie que tu n’hésites pas à aller au clash avec certain(e)s ?

Je ne sais pas si j’irais au clash, mais disons que je mets un point d’honneur à ne pas y laisser trop de plumes. Cela reste un métier, je n’ai pas envie de me faire mal pour un rôle, ce n’est pas nécessaire, on peut travailler dans la bienveillance et dans le respect de soi. Chacun son métier : le mien c’est de jouer ; celui d’un(e) réalisateur/trice, c’est de diriger une équipe. S’il ou elle me choisit, il ou elle doit avoir confiance en mon jeu et on est censés collaborer. Je ne suis pas là pour me faire piétiner, voire manipuler.

Être une actrice engagée, c’est la base ?

Non, c’est nécessaire pour moi ; autrement, ce boulot n’aurait pas de sens à mes yeux. Mais je peux comprendre que certaines personnes qui sont déjà militantes dans la vie de tous les jours n’aient pas envie de mêler leur engagement au cinéma. Je dois d’ailleurs apprendre à lâcher un peu de mou par rapport à ça. Je dois me dire, oui, il y a mon combat en tant que Mara dans ma vie privée, et il y a le cinéma. Il faut y aller step by step, même si c’est vrai que quand tu débarques dans ce métier en étant déjà un peu révoltée, tu as pleins d’idéaux. Ensuite, avec le recul, tu réalises que tu ne vas rien sauver. Au mieux, tu pourras éventuellement faire bouger les choses en acceptant certains rôles, notamment au niveau de la représentation féminine au cinéma, mais tu le fais pour toi, de façon très égoïste. Je ne le fais pas pour avoir la pancarte « actrice militante », mais plutôt pour ma santé mentale. Aujourd’hui, j’ai compris qu’il est parfois préférable de réussir à mettre une certaine distance.

Tu évoques la représentation féminine au cinéma, mais aussi l’idée qu’il faut changer nos imaginaires, que ce soit, par exemple, au niveau du rôle de la femme ou de la place des homosexuels et des non-binaires au cinéma… Cela évolue trop lentement selon toi ?

Heureusement il y a des films comme Compartiment n° 6, ou Julie en 12 chapitres, où l’on voit des femmes qui jouent des rôles féminins très intéressants, des rôles qui ont plusieurs couches et qui défendent un propos… Quand je vois le bien que ça me fait, je me dis que je ne dois pas être la seule à ressentir cela. Voir des corps de femmes différents, au service d’une histoire qui n’est pas toujours au profit d’un récit masculin… Comme le dit la cinéaste militante Maria Schneider : « Le cinéma est fait par les hommes, pour les hommes. » Si cela évolue, ça évolue encore beaucoup trop lentement et le cinéma est encore majoritairement fait par beaucoup d’hommes, blancs, hétéros…

C’est aussi l’une des raisons qui t’a poussée à faire ce métier ?

Je tiens à participer au changement d’imaginaire sur le corps féminin. Dans le choix de mes rôles et dans la façon de les interpréter, j’aime mettre de la profondeur. Arriver aussi à me dire que quand je rigole dans un film, je ne dois pas faire attention à mon triple menton. Il est temps d’enfin accepter que l’on puisse voir des plis de peau sur un corps de femme.

Isabelle Huppert, Ludivine Sagner, Béatrice Dalle, Adèle Exarchopoulos… On ne se sent pas trop petite en face de ces grandes actrices ?

Je peux admirer une actrice pour son œuvre, mais si je dois jouer avec elle, je pars du principe qu’on est collègues. Je ne vais pas dire que je suis hyper sereine lors des premières prises, mais très vite, je me dis qu’elles font le même métier que moi. L’avantage aussi d’avoir déjà joué avec de si grandes actrices, c’est que très vite, ça m’a permis de désacraliser les stars du cinéma français. En discutant avec elles, j’ai aussi réalisé qu’il n’y avait pas une façon d’y arriver. Chacun doit trouver sa route.

Tu n’es justement pas passée par les écoles de cinéma… Lorsque tu croises de jeunes comédiens issus des cours Florent…, ressens-tu parfois le fameux sentiment de l’imposteur ?

Tous les jours. J’ai toujours peur que les gens du milieu se retournent sur mon travail en se disant : « Mais quelle blague, elle a vraiment eu de la chance ». En même temps, je dois prendre confiance, j’ai déjà tourné dans plus de trente films, ce n’est pas pour rien. Mais évidemment, par rapport à l’articulation ou la montée d’émotion, quand je vois des gens maîtriser les outils théâtraux grâce à leur passage dans différentes écoles, je réalise que j’ai encore du boulot. Après, je me rassure en me disant qu’ils n’ont peut-être pas ma spontanéité… Il faut aussi que je fasse confiance aux réalisateurs/trices qui m’engagent.

Que ce soit dans La Rûche ou dans Rien à foutre, tu joues des rôles assez forts en émotion. On imagine que l’on ne ressort pas indemne de ce genre de tournage ?

C’est clair. Au cinéma, c’est particulier, tu rentres dans une énergie avec une équipe et tu n’as pas toujours la distance nécessaire par rapport à ton rôle. Lorsque le film est terminé, tu réalises ce que tu viens de traverser, et il faut avoir des bases solides, des gens qui t’entourent en dehors pour te ramener à la réalité. Pour La Rûche, j’avais vingt ans, c’était la première fois que je donnais tout, parce que j’avais l’impression qu’il fallait tout donner. Désormais, j’ai un peu plus d’expérience et ça me permet de donner autant d’intensité dans mes rôles, tout en me protégeant.

Avec Sophie Breyer — qui joue, elle aussi, dans La Rûche — et avec ta meilleure amie, Salomé Dewaels, vous êtes toutes les trois considérées comme les nouvelles pépites du cinéma belge. Vous avez un parcours similaire, ça vous arrive forcément de vous croiser sur les mêmes castings…

Très souvent, mais on se soutient. Cela ne veut pas dire qu’on ne ressent pas de la jalousie quand l’une ou l’autre obtient le rôle, mais c’est sain de pouvoir se le dire. C’est une jalousie bénéfique qui nous booste. Il faut aussi avoir conscience que si on n’obtient pas un rôle, ce n’est pas de la faute de l’actrice qui est choisie. Les réalisateurs/trices travaillent pendant des années sur un film et ils ont une idée bien précise des actrices ou des acteurs qu’ils recherchent. Avec Sophie et Salomé, nous sommes très soudées et l’on s’encourage. En même temps, nous avons aussi l’avantage d’être belges. En France, il y a tellement de compétition, c’est très difficile de sortir du lot, tandis qu’en Belgique, si tu te fais remarquer, les Français s’intéressent directement à toi. D’une certaine façon, ça nous a donc servi d’être des actrices belges.

Si tu devais te définir en tant qu’actrice ?

Je pense être une actrice assez modulable. Si j’ai confiance en la personne avec laquelle je travaille, je suis curieuse, j’ai envie de me surprendre et je peux donner énormément.

Une personnalité avec laquelle tu aimerais être bloquée dans le Thalys ?

Sacha Baron Cohen.

Ton plus gros stress de cinéma ?

Tous les castings. C’est une nouvelle fois le sentiment de l’imposteur qui resurgit. J’ai chaque fois l’impression que je vais me faire démasquer, c’est vraiment un exercice désagréable pour moi.

On arrive à Paris… Pour conclure, tu ne serais jamais devenue actrice si… ?

Si j’avais obtenu mon permis de conduire à 18 ans, je serais sur la route avec une camionnette.

1 UUR 22 MET Mara Taquin

De 25-jarige actrice speelde de ene rol na de andere in kortfilms, speelfilms en series. Onlangs nog in de Belgische film La Ruche, maar ook in de Franse film Rien à foutre, is deze jonge Brusselse actrice, die niet meer weg te denken is van het scherm, weggelegd voor een mooie toekomst in de filmindustrie.

Boris Rodesch nam de Thalys met Mara Taquin.

Hoe vaak kom je naar Parijs?

Ik reis minstens één keer heen en weer voor castings.

Wat betekende Parijs voor je toen je jonger was?

Ik kwam niet zo vaak weg uit Brussel. Mijn grootmoeder nam me mee naar Parijs om mijn verjaardag te vieren. De stad leek een soort fantasie, een mythe, maar ik had nooit gedacht dat ik er zo vaak heen zou gaan, en nog veel minder om er te werken. Het is een echte luxe.

Heb je nooit overwogen om je er te vestigen?

Het is bij me opgekomen omdat ik weet dat dingen gebeuren in Parijs. Maar ik ben evenzeer gehecht aan mijn evenwicht en mijn Brusselse roots. Ik heb dit ankerpunt nodig, het is essentieel voor mijn professionele ontwikkeling, en ook om een stapje terug te nemen uit de filmwereld.

Wat verkies je aan Parijs?

Het culturele aspect, er is daar zoveel aan de gang. Als je erheen gaat, heb je de behoefte om jezelf te stimuleren. Of het nu gaat om films te zien die in België niet in de zalen draaien of om naar concerten te luisteren... ik probeer er zoveel mogelijk van te profiteren.

Wat was de eerste film die je letterlijk omverblies?

In een opwelling zou ik zeggen Thelma & Louise, maar ik herinner me ook dat ik Ma vie en rose zag, een Belgische film geregisseerd door Alain Berliner. Het vertelt het verhaal van een jongetje dat voor de maatschappij zogenaamde vrouwelijke trekjes heeft. Ik was getekend, want dit gevoelige onderwerp was ook een avant-garde thema voor die tijd.

Toen je 17 was, werd je ontdekt door Camille Mol tijdens een wild casting voor haar afstudeerfilm bij IAD Créatures. Dus je carrière begon bij toeval?

Het is echt een gelukkig toeval. Eerlijk gezegd had ik er nooit aan durven denken om dit beroep te kiezen. Ik ben zo blij dat Camille iets in me zag dat ik niet herkend had. Zij ontdekte een lunaire en introverte kant in mij waarvan ik me zelf niet bewust was en die geen deel uitmaakte van mijn basistemperament, en dat heeft mij in de filmwereld gebracht.

Wanneer heb je voor het eerst tegen jezelf gezegd: ik ga hier mijn beroep van maken?

Dat heb ik mezelf nooit verteld. Het is ook een bescherming om jezelf te vertellen dat het op elk moment kan stoppen.

Ook al voelt het vandaag als het begin van een carrière, ik werk eraan en geef het uiterste van mezelf, maar ik probeer mezelf niet te veel wijs te maken dat dit mijn werk is. Ik geef er de voorkeur aan te denken dat het een ongelooflijke kans is dat ik deze ervaring mag hebben en dat, zelfs als het morgen eindigt, het al geweldig is.

Je hebt al zo’n 30 rollen gedaan... Kun je daar financieel van leven?

Twee jaar lang, ja. Ik moet niemand ondersteunen en toch zijn er momenten dat het echt moeilijk is. Gelukkig helpt mijn levensstijl. Bovendien heb ik tien jaar ervaring in de horeca, dus als ik weer in bars moet werken, doe ik dat zonder problemen. Soms mis ik die dynamiek van werken met vaste uren en een zekere zorgeloosheid.

Als je in het kort je carrière als actrice zou moeten omschrijven?

Er was die eerste rol in Creatures voor Camille Mol. Daarna zat ik in het tweede seizoen van Ennemi Public, waar ik mijn vroegere agent Emmanuelle Bourcy ontmoette. Het was ideaal om in de industrie te debuteren met zulke goedwillende mensen. En dan was er nog de kleine rol in de film Hors normes, geregisseerd door Olivier Nakache en Éric Toledano. Ongeacht het prestige van deze twee regisseurs was er, na het lezen van de pitch, geen twijfel dat ik deze rol niet wilde laten schieten. Omdat ik een opvoeder kon spelen die kinderen met autisme ondersteunt, dacht ik meteen dat het zin had en dat ik iets concreets zou leren. Er zijn mensen die hun hele leven bijzondere opvoeders zijn, en op een bepaald moment had ik het geluk aan de hand van deze prachtige mensen te worden meegenomen en hun dagelijks leven mee te maken. Dat is ook het mooie van dit beroep. Vervolgens heb ik Scorpex gedraaid met Vincent Cassel, La Ruche van Christope Hermans, Rien à Foutre met Adèle Exarchopoulos of La Syndicaliste met Isabelle Huppert. Het is super interessant om te beseffen dat elke filmmaker zijn eigen manier van werken heeft. Het is telkens een nieuw team, een nieuw project en een ander werkproces waaraan je je elke keer moet aanpassen.

(Opmerking: Scorpex is de eerste aflevering van een serie over de lockdown - 6 X Confiné.es - uitgezonden op Canal +).

Wat is tot nu toe de belangrijkste opname in je jonge carrière geweest?

Ik zou zeggen La Ruche, omdat het de eerste keer was dat ik van A tot Z betrokken was bij het maken van een film. Ik hou vooral van het werk in de aanloop naar een film. Dit dagelijkse onderzoek, waarbij je jezelf informeert en dingen leert, drijft me soms meer dan de opnamen op de set. Voor Rien à foutre, bijvoorbeeld, volgde ik een opleiding als makelaar... Het is geweldig om zoveel ervaring op te doen voor elke nieuwe film.

Laten we teruggaan naar Hors normes, waar je een stem gaf aan jonge opvoeders en kinderen met autisme... Dit relativeert ongetwijfeld het beroep van acteren?

Absoluut, ik heb deelgenomen aan een masterclass over deze film. Wanneer je «speelt» met kinderen met autisme, dwingt het je om echt te luisteren naar de persoon die tegenover je zit, en er is geen moment waarop je probeert te bedenken wat je zelf gaat doen, je stelt je gewoon ten dienste van de scène die zich ontvouwt. Wat de opvoeders betreft, besef je dat ze van jouw leeftijd zijn en dat ze elke dag opstaan uit onbaatzuchtigheid, dat ze klappen moeten incasseren, maar dat ze zoveel liefde te geven en te ontvangen hebben, en dat alles zonder de minste berekening. Ik weet nog dat ik na het filmen thuiskwam en dacht: «Ik maak films, geweldig, en dit is hoe we de wereld gaan veranderen...». Dit gezegd zijnde, het heeft me gedwongen mezelf in vraag te stellen en ook te begrijpen dat ik dankzij mijn beroep deze mensen in de schijnwerpers kan zetten. Ik maak geen films om mezelf in de kijker te zetten, maar om te belichten wat anderen doen.

In je begintijd, toen je veelvuldig castings had in Parijs, zei je dat je het jammer vond dat de filmwereld nog steeds een zeer bevoorrecht milieu is...

Afgezien van de kosten van treinkaartjes of busritten naar Parijs, speelt inderdaad ook de tijd die jonge acteurs en actrices aan deze talrijke castings besteden een rol. Dit alles voor een auditie van 15 minuten… Ik heb het geluk dat mijn ouders mij altijd moreel hebben gesteund, maar ik moest ‘s avonds toch werken om de reizen te kunnen betalen. Er zijn veel jonge acteurs die moeten stoppen omdat ze geen andere keuze hebben, omdat het financieel niet mogelijk is, en in die zin blijft cinema inderdaad een zeer bevoorrecht milieu. Gelukkig stonden mijn planeten al snel op één lijn, maakte ik een kleine naam in Brussel en hoefde ik nooit meer achter castings aan te rennen in de hoop koste wat kost een rol te krijgen.

Heb je een strategie bij het opbouwen van je «carrière»?

Het zijn duidelijk keuzes. En als ik weer in de horeca moet werken om ze te verwezenlijken, zal ik dat zonder aarzelen doen. Sinds ik deze optie heb, kan ik mijn films kiezen volgens mijn gevoel. Als ik een rol voel, ga ik ervoor, zo niet, dan liever niet. Ik heb echt zin om deel uit te maken van de filmindustrie. En wat ik zeker weet is dat ik geen duizend series ga doen.

Om welke redenen?

Ik ben bang om verstrikt te raken in een personage. In Belgische, in tegenstelling tot Engelse series, geven we onszelf niet de middelen, nemen we niet de tijd die nodig is om de personages voldoende diepgang te geven. Ik zou graag in series zitten die een behoorlijk budget hebben, maar Belgische series liggen nog altijd moeilijk.

In een interview zei je dat je niet de marionet van de regisseurs wil zijn... Ben je dan ook niet bang om met bepaalde mensen de confrontatie aan te gaan?

Ik weet niet of ik tot een clash zou gaan, maar ik maak er een punt van geen pluimen te verliezen. Het blijft een beroep, ik heb geen zin om mezelf te kwetsen voor een rol, dat is niet nodig, je kunt werken met goede wil en zelfrespect. Ieder zijn eigen beroep: het mijne is acteren, dat van regisseur is een team leiden. Als hij of zij mij kiest, moet hij of zij vertrouwen hebben in mijn spel en zijn we verondersteld samen te werken. Ik ben hier niet om onder de voet gelopen of gemanipuleerd te worden.

Een toegewijde actrice zijn, is dat de basis?

Nee, het is noodzakelijk voor mij, anders zou deze baan geen zin hebben in mijn ogen. Maar ik kan begrijpen dat sommige mensen die in het dagelijks leven al militant zijn, hun engagement niet willen vermengen met films. Trouwens, ik moet leren om een beetje los te laten in dit opzicht. Ik moet tegen mezelf zeggen: ja, er is mijn strijd als Mara in mijn privéleven en er is de film. Je moet het stapsgewijs doen, ook al is het waar dat, als je in dit vak komt en je al een beetje rebels bent, je veel idealen hebt. Achteraf besef je dat je niets zult redden. In het beste geval kun je een verschil maken door bepaalde rollen op je te nemen, vooral wat betreft de vertegenwoordiging van vrouwen in de film, maar je doet het voor jezelf, op een zeer egoïstische manier. Ik doe het niet om het etiket «militante actrice» te krijgen, maar eerder voor mijn geestelijke gezondheid. Vandaag heb ik begrepen dat het soms beter is als je een zekere afstand weet te bewaren.

Je hebt het over de vertegenwoordiging van vrouwen in de cinema, maar ook over het idee dat we onze verbeeldingswereld moeten veranderen, of het nu gaat over de rol van vrouwen of de positie van homoseksuelen en niet-binaire mensen in de cinema... Denk je dat dit zich te traag ontwikkelt?

Gelukkig zijn er films als Compartment No. 6 of Julie en 12 chapitres waarin vrouwen heel interessante vrouwelijke rollen spelen, rollen die meerdere lagen hebben en opkomen voor een zaak... Als ik merk hoe goed me dat doet, denk ik bij mezelf dat ik waarschijnlijk niet de enige ben die er zo over denkt. Het zien van verschillende vrouwenlichamen in dienst van een verhaal dat niet altijd in het voordeel van een mannelijke verteller is... Zoals de militante filmmaker Maria Schneider zei: «Films worden gemaakt door mannen voor mannen.» Zelfs als dat aan het veranderen is, verandert het nog veel te langzaam en worden films nog steeds voornamelijk gemaakt door veel blanke, heteroseksuele mannen.

Is dat ook een van de redenen waarom je dit beroep hebt gekozen?

Het is belangrijk voor mij om deel te nemen aan het veranderen van ideeën over het vrouwelijk lichaam. Ik hou ervan om diepte te brengen in de keuze van mijn rollen en de manier waarop ik ze interpreteer. Ik moet mezelf ook voorhouden dat, als ik in een film lach, ik niet op mijn dubbele kin hoef te letten. Het is tijd om eindelijk te accepteren dat je huidplooien mag zien op een vrouwenlichaam.

Isabelle Huppert, Ludivine Sagner, Béatrice Dalle, Adèle Exarchopoulos... Voel je je niet te klein in het bijzijn van deze grote actrices?

Ik kan een actrice bewonderen voor haar werk, maar als ik met haar moet spelen, ga ik ervan uit dat we collega’s zijn. Ik zal niet zeggen dat ik hyper kalm ben bij de eerste takes, maar al snel denk ik bij mezelf dat zij hetzelfde beroep uitoefenen als ik. Het voordeel dat ik al met zulke grote actrices heb gespeeld, is ook dat ik heel snel de sterren van de Franse film kon ontheiligen. Door met hen te praten realiseerde ik me ook dat er niet één manier is om het te maken. Iedereen moet zijn eigen weg vinden.

Je bent niet naar de filmschool geweest... Als je jonge acteurs ontmoet die van de Cours Florent komen, heb je dan soms dat fameuze gevoel dat je een indringer bent?

Dagelijks. Ik ben altijd bang dat mensen in de industrie op mijn werk terugkijken en zeggen: «Wat een grap, ze heeft echt geluk gehad». Tegelijkertijd moet ik vertrouwen hebben, ik heb in meer dan dertig films gespeeld, dat is niet niks. Maar natuurlijk, op het gebied van articulatie of het overbrengen van emotie, wanneer ik zie hoe mensen die verschillende scholen hebben doorlopen deze theatertechnieken beheersen, besef ik dat er nog werk is. Achteraf stel ik mezelf gerust door me voor te houden dat ze misschien niet mijn spontaniteit hebben. Ik moet ook vertrouwen hebben in de regisseurs die mij inhuren.

In zowel La Ruche als Rien à foutre, speel je rollen die vrij sterk emotioneel zijn. Men kan zich inbeelden dat men niet ongeschonden uit zo’n opnames komt?

Duidelijk. In films is het iets speciaals, je gaat een energie aan met een team en je hebt niet altijd de nodige afstand van je rol. Als de film klaar is, besef je wat je net hebt meegemaakt en heb je een solide basis nodig, mensen die je buiten de film omringen en je terugbrengen naar de realiteit. Met La Ruche was ik 20 jaar oud, het was de eerste keer dat ik alles gaf, omdat ik voelde dat je alles moest geven. Nu heb ik wat meer ervaring en daardoor kan ik mijn rollen net zo intens spelen terwijl ik mezelf bescherm.

Samen met Sophie Breyer, die ook meespeelt in La Ruche, en je beste vriendin Salomé Dewaels, worden jullie drieën wel eens de nieuwe goudklompjes van de Belgische cinema genoemd. Jullie hebben dezelfde achtergrond, dus is het onvermijdelijk dat jullie elkaar tegenkomen bij dezelfde audities...

Heel vaak, maar we steunen elkaar. Dat betekent niet dat we geen jaloezie voelen als de een of de ander de rol krijgt, maar het is gezond om dat tegen elkaar te kunnen zeggen. Het is een heilzame jaloezie die ons opbouwt. Je moet je er ook van bewust zijn dat als je geen rol krijgt, dat niet de schuld is van de actrice die werd gekozen. Regisseurs werken jaren aan een film en hebben een precies idee van welke actrices of acteurs zij zoeken. Met Sophie en Salomé zijn we heel hecht en moedigen we elkaar aan. Tegelijkertijd hebben we ook het voordeel dat we Belg zijn. In Frankrijk is er zoveel concurrentie dat het erg moeilijk is om op te vallen, terwijl in België, als je je onderscheidt, de Fransen direct in je geïnteresseerd zijn. Dus in zekere zin heeft het feit dat we Belgische actrices zijn, ons geholpen.

Als je jezelf moest definiëren als een actrice?

Ik denk dat ik nogal een modulaire actrice ben. Als ik vertrouwen heb in de persoon met wie ik werk, ben ik nieuwsgierig, wil ik mezelf verrassen en kan ik enorm veel geven.

Een persoonlijkheid met wie je in de Thalys zou willen zitten?

Sacha Baron Cohen.

Je grootste cinemastress?

Alle castings. Het is weer dat gevoel van de bedrieger die opduikt. Ik voel me elke keer blootgesteld, het is echt een onprettige ervaring voor mij.

We komen aan in Parijs... Tot slot: je zou nooit actrice geworden zijn mocht…?

Ik mijn rijbewijs hebben gehaald toen ik 18 was; dan zou ik nu rondcruisen met een busje.

Mara Taquin
 Insta : mara_taquin
www.thalys.com