1h22 avec Charlotte Abramow

Writer // Boris Rodesch - Photography // Sébastien Van de Walle

Photographe belge vivant à Paris, Charlotte Abramow est une artiste au regard conscient et féministe. Également vidéaste, elle a notamment réalisé plusieurs clips pour Angèle ainsi que le premier clip officiel de Georges Brassens, « Les Passantes », une ode à la beauté des femmes dans toute leur diversité présentée à l’occasion de la Journée internationale des Droits des Femmes. Parmi ses œuvres marquantes figure son premier livre, « MAURICE, Tristesse et rigolade », un conte sur la vieillesse et la maladie de son papa.

Boris Rodesch a pris l’Eurostar avec Charlotte Abramow

Si tu devais présenter
ton travail de photographe ?

J’aime composer mes images en les pensant en amont et j’espère qu’elles deviennent le point de départ d’une discussion ou d’un débat. J’ai trouvé une certaine signature dans le studio que je vois comme une toile blanche. J’aime aussi que mes images soient minimalistes, lisibles et graphiques, ce qui me permet de me concentrer sur les couleurs. Cet attrait naturel pour le studio est lié au fait que je suis davantage dans une photographie de l’imaginaire, où je m’arrange pour créer les moments plutôt que de capter les instants. Mon travail traite de sujets autour de l’intimité (qui est politique), comme le rapport au corps ou le féminisme. Au final, je traduis ce que je vis en tant qu’humaine dans une pratique artistique.

On imagine que le studio
te réclame une préparation importante ?

J’ai une idée générale, ou parfois plus précise sur base de croquis. Je choisis les vêtements, les couleurs et j’utilise souvent des accessoires. Je peux y voir des éléments métaphoriques qui racontent quelque chose, soit de la personne photographiée, soit d’un thème que j’ai envie d’évoquer. C’est un mélange de préparation et d’instinct, qui laisse parfois apparaître des images imprévues. En tant qu’artiste, c’est important de ne pas s’enfermer dans un processus trop carré pour laisser une place à l’improvisation, qui peut entrainer de belles surprises et de l’amusement. C’est aussi une façon de laisser libre cours à sa créativité.

Pour quelle raison viens-tu à Bruxelles ?

Pour un projet avec l’association Bloom qui œuvre pour la protection de l’océan. L’océan est en train de brûler et d’être massivement détruit. Si on le laisse mourir, on meurt. L’objectif est de sensibiliser le grand public à notre interdépendance et aux dangers de la pêche industrielle, qui est financée par l’argent public. Ce projet me tient à cœur, car c’est essentiel pour moi de donner du sens à mon travail.

Comme ton projet sur les apicultrices qui insistait sur la préservation des abeilles. Tu mènes donc d’autres combats que le féminisme ?

Tous mes combats sont liés. Dans ma vision du féminisme, il y a une vision plus globale de justice sociale, elle-même liée à la justice climatique. Le climat nous concerne tous. Comme le dit Cyril Dion, ce n’est pas mon climat ou ma planète. Il y a une vraie urgence écologique et sociale et j’essaie de mettre mon art à son service.

À la façon de Cyril Dion, en soulignant de belles actions plutôt qu’en donnant des leçons ?

Il y a un juste milieu puisque comme l’ont prouvé des études, la peur est sept fois plus mobilisatrice que l’espoir. Aujourd’hui, on nous dit tellement que tout va mal, on en devient presque insensible. On ne visualise pas assez les solutions et les politiques ne les mettent surtout pas en pratique.

Gamine, ça évoquait quoi pour toi Paris ?

Une ville effervescente, belle et artistique. Je me souviens des musées et du centre Pompidou, où à 4 ans, j’avais flashé sur les trois « Bleu » de Miro, en disant à ma maman : « C’est la vie ! ».

La photo était moins accessible qu’aujourd’hui, où l’on se prend tous pour des photographes grâce à la qualité des appareils sur les smartphones…

C’est intéressant. Tout le monde peut prendre des photos et apporter son point de vue ou révéler des récits qu’on n’avait pas l’occasion de voir à l’époque. Peu importe qu’elle soit réalisée au smartphone ou avec un appareil dernier cri, la qualité d’une photo dépend de l’intention, du propos, du sujet et surtout de l’émotion qu’elle va susciter.

À 16 ans, tu participes à un stage aux Rencontres de la photographie d’Arles, où tu rencontres le photographe de mode italien, Paolo Roversi, et un déclic se produit.

En tant qu’ado, je suis arrivée à la photographie par les magazines de mode. À cet âge-là, qu’on le veuille ou non, la représentation unique des femmes dans les magazines finit par intégrer ta vie. J’étais tombée sur son portrait emblématique de Natalia Vodianova. Contrairement aux autres photographes de mode, plus proches d’un rapport de désir, son travail avait quelque chose de très artistique et de très mystérieux. Sa vision de la femme, douce et honnête, était différente. Il a apporté une fragilité et une authenticité très touchante. J’ai aussi été séduite par sa philosophie sur le studio, qu’il présente comme un petit théâtre où le rêve se produit. Lors de ce stage, il avait été impressionné par la quantité de photos que j’avais déjà prises et il avait senti à quel point j’étais passionnée. L’année suivante, je suis revenue à Arles et il avait publié un article sur mon travail dans le Polka Magazine. Ce texte écrit de la main de mon idole m’a donné des ailes. En tant qu’artiste et en tant que femme, on peut se perdre dans des questions de légitimité et c’est vrai qu’à 16 ans, bien plus qu’aujourd’hui, j’avais l’impression que tout était possible.

Quand penses-tu pour la première fois que cette passion deviendra un métier ?

À 13 ans, quand j’ai reçu mon Nikon Coolpix. J’ai pris les premières photos des pattes de mon chat et j’ai su que ce serait ça et rien d’autre. C’était l’époque où tout le monde voulait sa photo de profil sur Facebook. Je suis un peu devenue la photographe de mes copines à l’école. C’était chouette de voir que les filles pouvaient prendre confiance en voyant leur portrait. Il y avait aussi une volonté de leur révéler leur propre beauté et d’apporter une imagerie un peu plus authentique et sensible. Je n’ai jamais sursexualisé mes modèles et ce rapport de jeune fille à jeune fille a toujours été très important à mes yeux.

Comment choisis-tu tes modèles, que tu préfères nommer, à l’instar de Paolo Roversi, des « muses » ?

C’est un mélange de goût, d’instinct et de rencontres. Je n’ai pas de critères précis, elles ont toutes en commun une certaine forme de douceur et de poésie. Je fais souvent des castings sauvages pour mes projets. J’en suis donc venue à créer une adresse mail — castingbycharlotte@gmail.com. Je reçois des messages avec des visages en tous genres. Et je suis surprise par le nombre de personnes qui ne savent pas qu’elles sont belles. C’est beau de voir à quel point la photo peut avoir un pouvoir thérapeutique sur le rapport à notre image ou à notre corps.

Malgré une cover pour le Elle Belgique à 17 ans et le Prix Picto de la Jeune Photographie de Mode à 20 ans, la photo de mode ne te suffit plus et ta conscience féministe s’éveille.

J’avais déjà intériorisé cette idée qu’il y avait quelque chose qui clochait sur la représentation des femmes, que c’était très étriqué et toujours dans ce rapport de désir, de validation du regard de l’homme. J’avais envie de montrer des photos plus honnêtes et des représentations moins sexualisées des femmes. J’ai réalisé ça en travaillant avec des agences de mannequins. Il y avait un truc glauque, une sorte de business autour du corps qui déshumanise complètement les filles. J’ai rapidement compris que la mode était à côté de la plaque et assez destructrice pour la construction des jeunes femmes et des jeunes hommes. Et c’est lors d’un voyage aux îles Féroé en 2017, où je suis partie à la rencontre des habitants pour réaliser une série de portraits, que j’ai pris conscience que j’aimais mettre en scène les gens, peu importe la façon dont ils étaient habillés ou s’ils étaient mannequins ou non. La mode peut apporter des choses à mon travail, mais c’est plus de l’ordre du costume. J’utilise désormais les vêtements pour qu’ils racontent des choses ou parce qu’ils font partie de la composition graphique de l’image.

En 2018, tu réalises deux clips d’Angèle pour « La loi de Murphy » et « Je veux tes yeux ». Un mot sur votre rencontre ?

J’aimais bien ses capsules sur Instagram. Je trouvais qu’elle avait du talent, un certain sens de la mise en scène et de l’humour. J’ai commencé à la suivre sur les réseaux et le lendemain, sa manageuse — Sylvie Farr — m’a envoyé un message parce qu’elles avaient besoin de photos pour annoncer ses premiers concerts dans des bars. On a fait ça gratuitement, nous avons juste loué un studio qui coûtait 40 euros l’heure. C’était le fameux shooting avec les spaghettis sur la tête, ça a été le point de départ de cette collaboration.

Une collaboration qui va te permettre de sensibiliser les plus jeunes au féminisme ?

Ce qu’Angèle m’a surtout apporté, c’est le passage à la vidéo. Après, j’ai encore réalisé et co-écrit le clip de « Balance ton quoi » avec Ophélie Secq, qui est aussi ma maquilleuse. Elle a eu un rôle fondateur dans ma vie parce qu’elle vient d’un milieu social différent et qu’elle a toujours eu un engagement social très fort. C’est la première à m’avoir instruite au féminisme et nous avons ensuite instruit Angèle. Il y a eu cette espèce de passation entre filles qui était très touchante. Il y a aussi eu la volonté d’Angèle de faire écho à cette cause en nous offrant une belle liberté artistique, qui a permis de faire passer un message sociétal pourtant basique mais important, avec un objet de pop culture travaillé.

Tes photos ont-elles une certaine conscience politique ?

Oui, même si je ne sais pas comment on peut juger ma propre conscience politique. J’ai rapidement compris que je voulais associer la forme et le fond. Au début de mon parcours, j’insistais davantage sur des sentiments intérieurs, je travaillais sur des thèmes propres à la nostalgie de mon enfance. Au fur et à mesure, je me suis ouverte au monde extérieur et aux enjeux de nos sociétés. J’ai eu envie de proposer des photos qui soient très lisibles sur le plan de la forme, en m’inspirant parfois de l’histoire de l’art, mais aussi des codes très visuels et impactant de la mode ou de la pub, et de les lier soit à des sujets autour de l’intime, soit à des sujets plus politiques. La question étant de savoir comment, avec l’esthétique de la photo de pub ou de mode, parler d’un sujet de société ou d’un tabou.

Comme pour « Le petit manuel Sex Education » réalisé pour Netflix ?

Il y avait des grandes affiches partout dans Paris. J’avais, par exemple, reçu un message d’une fille qui me disait qu’elle se baladait avec sa maman et que grâce à ma photo, elle venait de découvrir, à 55 ans, à quoi ressemblait un clitoris. Si mon travail peut être le point de départ d’une discussion ou d‘un changement de mentalité, c’est la plus belle chose qui puisse m’arriver.

Te définirais-tu comme
une photographe engagée ?

Si je pense à des photojournalistes qui sont sur le terrain, ils doivent bien rire en pensant à moi, bien au chaud dans mon studio, qui se dit être une photographe engagée. En revanche, c’est sûr que je tiens à proposer une photographie plutôt consciente et connectée à notre société et aux enjeux qu’elle traverse. Et même si ça me paraît évident de me battre pour des questions d’égalité, d’équité, de justice et de représentation, ce n’est pas toujours le cas pour tout le monde. Je n’ai donc pas la prétention de me dire photographe engagée, mais c’est sûr que je suis sensible à l’engagement.

Peux-tu revenir sur ce livre « MAURICE, Tristesse et rigolade » et sur ce que ce projet sur la maladie de ton papa t’a apporté ?

D’abord de pouvoir vivre cette expérience avec lui. Mais également de lui apporter de la joie. Il disait souvent qu’il voulait être un vieillard amusant et amusé. Le fait d’avoir les projecteurs sur lui regonflait son ego, parce que quand tu es vieux et malade, ton quotidien est morose et limité à la dépendance. Ma maman me racontait que pendant la campagne de financement participative, il lui demandait tous les jours : « Alors, combien je vaux ? ». Ce projet a aussi changé mon rapport à sa maladie. Au début, j’étais dans l’effroi, la tristesse et la colère. Je me disais que c’était un miracle qu’il se soit réveillé de son coma, mais j’étais frustré de me dire qu’avec ses séquelles neurologiques, il ne serait plus jamais le même. La photographie m’a appris à changer mon regard, à ne plus subir sa maladie et à apprendre à l’apprivoiser en la voyant comme une poésie. L’appareil photo l’amusait et le stimulait et ça nous permettait d’avoir un échange dans une sorte de jeu. On me demande souvent quel est mon rêve et je réponds que c’était de pouvoir faire ce projet avec mon papa. Il est malheureusement parti deux mois avant l’impression du livre. Dix jours après sa mort, j’étais à l’imprimerie, c’était très spécial mais étrangement, ça m’a aidé d’être noyée dans toutes ces photos et interviews. Aujourd’hui, le livre est en quelque sorte inaccessible puisqu’il est en rupture de stock. J’ai réalisé que c’était un peu égoïste de ma part, car la maladie est une réalité pour beaucoup de gens, qu’ils soient malades ou aidants, et je sais qu’il a fait du bien à certaines personnes. C’est pourquoi je me dois de le rééditer. Six ans plus tard, je me rends aussi compte avec tristesse que c’était mon projet le plus important, le plus fort et celui dont je suis la plus fière.

Nous arrivons à Bruxelles… Quelle serait ta mission en tant que photographe ?

Montrer tous types de gens, de corps et de vécus, afin de visibiliser l’existence de ceux qui sont exclus des représentations communes. Il faut éduquer la responsabilité de notre regard parce que quand on a des clichés dans les yeux, on ne réalise pas les répercussions que ça peut avoir sur la vie des gens.

Belgische fotografe Charlotte Abramow woont in Parijs en is een kunstenares met een bewuste en feministische blik. Ze is ook videokunstenaar en regisseerde verschillende clips voor Angèle, evenals de eerste officiële videoclip van Georges Brassens’ Les Passantes, een ode aan de schoonheid van vrouwen in al hun diversiteit, gepresenteerd ter gelegenheid van de Internationale Dag van de Rechten van de Vrouw. Een van haar meest gedenkwaardige werken is haar eerste boek, MAURICE, Tristesse et rigolade, een verhaal over de ouderdom en ziekte van haar vader.

Boris Rodesch nam samen met Charlotte Abramow de Eurostar

Hoe zou je je werk als fotografe omschrijven?

Ik stel mijn beelden graag samen door er van tevoren over na te denken en ik hoop dat ze het uitgangspunt worden van een discussie of een debat. Ik heb een bepaalde signatuur gevonden in de studio, die ik zie als een leeg canvas. Ik hou er ook van dat mijn beelden minimalistisch, leesbaar en grafisch zijn, waardoor ik me kan concentreren op de kleuren. Deze natuurlijke aantrekkingskracht tot de studio heeft te maken met het feit dat ik meer van denkbeeldige fotografie houd, waarbij ik erin slaag momenten te creëren in plaats van ze vast te leggen. Mijn werk gaat over onderwerpen rondom intimiteit (wat politiek is), zoals de relatie met het lichaam en het feminisme. Uiteindelijk vertaal ik wat ik als mens ervaar naar een artistieke vorm.

We kunnen ons voorstellen dat de studio veel voorbereiding vereist?

Ik heb een algemeen idee, of soms een preciezer idee op basis van schetsen. Ik kies de kleding, de kleuren en ik gebruik vaak accessoires. Ik zie er metaforische elementen in die iets vertellen, dat kan over de gefotografeerde persoon zijn of over een thema dat ik wil oproepen. Het is een mix van voorbereiding en instinct, wat soms tot onverwachte beelden leidt. Als kunstenares is het belangrijk om niet verstrikt te raken in een te vierkant proces en ruimte te laten voor improvisatie, wat kan leiden tot prachtige verrassingen en plezier. Het is ook een manier om je creativiteit de vrije loop te laten.

Waarom ga je naar Brussel?

Voor een project met de Bloom Association, die zich inzet voor de bescherming van de oceaan. De oceaan staat in brand en wordt massaal vernietigd. Als we de oceaan laten sterven, sterven wij ook. Het doel is om het publiek bewust te maken van onze onderlinge afhankelijkheid en de gevaren van de industriële visserij, die met overheidsgeld wordt gefinancierd. Dit project ligt me na aan het hart, omdat het voor mij essentieel is om betekenis te geven aan mijn werk.

Zoals je project over imkers, dat zich richtte op het behoud van bijen. Dus je voert ook andere gevechten dan het feminisme?

Al mijn gevechten zijn met elkaar verbonden. In mijn visie op feminisme is er een meer globale visie op sociale rechtvaardigheid, die zelf dan weer verbonden is met klimaatrechtvaardigheid. Het klimaat gaat ons allemaal aan. Zoals Cyril Dion zegt: het is niet mijn klimaat of mijn planeet. Er is een echte ecologische en sociale noodsituatie en ik probeer mijn kunst in dienst daarvan te stellen.

Zoals in de stijl van Cyril Dion, goede daden benadrukken in plaats van lessen geven?

Er is een gulden middenweg, want studies hebben aangetoond dat angst er zeven keer meer voor zorgt dat er actie ondernomen wordt dan hoop. Tegenwoordig horen we zo vaak over hoe slecht het gaat, dat we er bijna ongevoelig voor worden. We maken oplossingen te weinig zichtbaar en de politici brengen ze al helemaal niet in praktijk.

Wat betekende Parijs voor jou als kind?

Een bruisende, mooie en artistieke stad. Ik herinner me de musea en het Centre Pompidou, waar ik op vierjarige leeftijd gebiologeerd werd door de drie ‘Bleus’ van Miro en tegen mijn moeder zei: “Zo is het leven!” 

Fotografie was minder toegankelijk dan nu, tegenwoordig denken we allemaal dat we fotografen zijn dankzij de kwaliteit van de camera’s op onze smartphones ...

Iedereen kan foto›s maken en zo bijdragen met zijn eigen standpunt, of verhalen onthullen die we op dat moment niet te zien kregen. Of de foto nu is gemaakt met een smartphone of een ultramoderne camera, de kwaliteit van een foto hangt af van de intentie, de aanleiding, het onderwerp en vooral van de emotie die de foto oproept.

Toen je zestien was, nam je deel aan een cursus op de Rencontres de la photographie d’Arles, waar je de Italiaanse modefotograaf Paolo Roversi ontmoette, en er was een klik.

Als tiener kwam ik via modetijdschriften in aanraking met fotografie. Of we willen of niet, op die leeftijd wordt de enige manier waarop vrouwen afgebeeld staan in tijdschriften een deel van je leven. Ik zag zijn iconisch portret van Natalia Vodianova ergens in staan. In tegenstelling tot andere modefotografen, die dichter bij een relatie van verlangen stonden, had zijn werk iets heel artistieks en mysterieus. Zijn milde en eerlijke visie van de vrouw was anders. Hij voegde een kwetsbaarheid en authenticiteit toe die erg pakkend was. Ik werd ook verleid door zijn filosofie over de studio, die hij ziet als een klein theater waar dromen ontstaan. Tijdens de cursus was hij onder de indruk van het aantal foto›s dat ik al had gemaakt en hij merkte hoe gepassioneerd ik was. Het jaar daarop was ik terug in Arles en had hij een artikel over mijn werk gepubliceerd in Polka Magazine. Deze tekst geschreven door mijn idool gaf me vleugels. Als kunstenares en als vrouw kun je jezelf verliezen in vragen over legitimiteit, en het is waar dat ik op mijn zestiende (veel meer dan nu) de indruk had dat alles mogelijk was.

Op welk moment denk je voor het eerst dat deze passie je beroep zou kunnen worden?

Toen ik 13 was en mijn Nikon Coolpix kreeg. Mijn eerste foto’s waren foto’s van de poten van mijn kat en ik wist dat dit het zou worden en niets anders. Het was de tijd dat iedereen een profielfoto van zichzelf op Facebook wilde. Ik werd toen de fotografe voor mijn vriendinnen op school. Het was geweldig om te zien hoe de meisjes zelfvertrouwen kregen toen ze hun foto zagen. Er was ook een verlangen om hun eigen schoonheid te laten zien en om beelden te gebruiken die wat authentieker en gevoeliger waren. Ik heb mijn modellen nooit overgeseksualiseerd en deze relatie tussen jonge meisjes is altijd heel belangrijk voor me geweest.

Hoe kies je je modellen, die je net als Paolo Roversi liever ‹muzen› noemt?

Het is een combinatie van smaak, instinct en ontmoetingen. Ik heb geen precieze criteria, ze hebben allemaal een bepaalde zachtheid en poëzie gemeen. Ik cast vaak spontaan voor mijn projecten. Dus heb ik besloten een e-mailadres aan te maken: castingbycharlotte@gmail.com. Ik ontvang berichten met allerlei gezichten. En ik ben verbaasd over het aantal mensen dat niet weet dat ze mooi zijn. Het is prachtig om te zien in hoeverre fotografie een therapeutisch effect kan hebben op onze relatie met ons beeld of ons lichaam.

Ondanks het feit dat je op 17-jarige leeftijd een cover voor Elle België won en op 20-jarige leeftijd de Picto-prijs voor jonge modefotografen, was modefotografie niet langer genoeg voor je en werd je feministische geweten wakker.

Van binnen had ik altijd al het idee dat er iets mis was met de manier waarop vrouwen werden gerepresenteerd, allemaal heel beperkt en altijd in relatie tot verlangen, bevestiging zoekend in de ogen van de man. Ik wilde eerlijkere foto’s laten zien en vrouwen minder geseksualiseerd weergeven. Dit realiseerde ik me toen ik samenwerkte met modellenbureaus. Het had iets engs, alsof het lichaam een soort bedrijf was dat de meisjes volledig ontmenselijkte. Ik begreep al snel dat de mode de plank missloeg en nogal destructief was voor de ontwikkeling van jonge vrouwen en mannen. En tijdens een reis naar de Faeröer Eilanden in 2017, waar ik een serie portretten wilde maken van de lokale bevolking, realiseerde ik me dat ik ervan hield om mensen te ensceneren, ongeacht hoe ze gekleed waren en of ze model waren of niet. Mode kan dingen toevoegen aan mijn werk, maar dan is het meer een kwestie van een kostuum. Ik gebruik nu kleding omdat het een verhaal vertelt of omdat het deel uitmaakt van de grafische compositie van het beeld.

In 2018 regisseerde je twee videoclips voor La loi de Murphy en Je veux tes yeux van Angèle. Kun je iets vertellen over jullie ontmoeting?

Ik vond haar Instagram posts altijd leuk. Ik vond dat ze talent had, een zeker gevoel voor enscenering en humor. Ik begon haar te volgen op de sociale netwerken en de volgende dag stuurde haar manager (Sylvie Farr) me een berichtje omdat ze foto’s nodig hadden voor de aankondiging van haar eerste optredens in bars. Dat hebben we gratis gedaan, we huurden gewoon een studio die 40 euro per uur kostte. Het was de beroemde shoot met de spaghetti op het hoofd, en het begin van deze samenwerking.

Een samenwerking waarmee je jongeren bewuster kunt maken van feminisme?

Wat Angèle me vooral heeft gegeven is de overstap naar video. Daarna regisseerde en schreef ik mee aan de video voor Balance ton quoi met Ophélie Secq, die ook mijn visagiste is. Ze speelde een bepalende rol in mijn leven omdat ze uit een andere sociale achtergrond komt en altijd een zeer sterke sociale betrokkenheid heeft gehad. Zij was de eerste die me leerde over het feminisme en vervolgens gaven we dit door aan Angèle. Er was een soort overdracht tussen meisjes die erg aandoenlijk was. Angèle wilde deze zaak ook uitdragen door ons veel artistieke vrijheid te geven, waardoor we een fundamentele maar belangrijke maatschappelijke boodschap konden overbrengen met een popcultuurobject.

Hebben je foto’s een politiek geweten?

Ja, hoewel ik niet weet hoe iemand mijn eigen politieke geweten kan beoordelen. Ik realiseerde me al snel dat ik vorm en inhoud wilde combineren. Aan het begin van mijn carrière richtte ik me meer op mijn innerlijke gevoelens en werkte ik rond thema’s van nostalgie naar mijn kindertijd. Naarmate de tijd verstreek, stond ik meer open voor de buitenwereld en voor de uitdagingen waar onze samenlevingen mee te maken hebben. Ik wilde foto’s laten zien die qua vorm zeer leesbaar waren, waarbij ik me soms liet inspireren door de kunstgeschiedenis, maar ook door de zeer visuele en impactvolle codes van de mode of de reclame, en ze koppelen aan intieme onderwerpen of meer politieke onderwerpen. De vraag is hoe je de esthetiek van reclame- of modefotografie kunt gebruiken om over een maatschappelijk probleem of taboe te praten.

Zoals ‘Le petit manuel Sex Education’ gemaakt voor Netflix?

In heel Parijs hingen grote posters. Ik kreeg bijvoorbeeld een berichtje van een meisje dat vertelde dat ze met haar moeder aan het wandelen was en dat ze dankzij mijn foto net op haar 55e pas had ontdekt hoe een clitoris eruitzag. Als mijn werk het uitgangspunt kan zijn voor een discussie of een mentaliteitsverandering, dan is dat het beste wat me kan overkomen.

Zou je jezelf omschrijven als een geëngageerde fotografe?

Fotojournalisten in het veld zullen denk ik hard moeten lachen als ze aan mij denken, weggestopt in mijn studio en bewerend een geëngageerde fotografe te zijn. Aan de andere kant is het duidelijk dat ik wil dat mijn fotografie zich meer bewust is van en verbonden is met onze samenleving en de problemen waar die mee te maken heeft. En ook al lijkt het voor mij vanzelfsprekend om te strijden voor zaken als gelijkheid, eerlijkheid, rechtvaardigheid en vertegenwoordiging, dat is niet altijd voor iedereen het geval. Ik beweer dus niet dat ik een geëngageerde fotografe ben, maar ik ben zeker wel gevoelig voor betrokkenheid.

Kun je iets vertellen over het boek ‘MAURICE, Tristesse et rigolade’ en wat dit project over de ziekte van je vader voor je heeft betekend?

Ten eerste om deze ervaring met hem te kunnen beleven. Maar ook om hem vreugde te brengen. Hij zei vaak dat hij een oude man wilde zijn die amusant en geamuseerd was. Het feit dat hij in de schijnwerpers stond, versterkte zijn ego, want als je oud en ziek bent, is je dagelijks leven somber en beperkt tot afhankelijkheid. Mijn moeder vertelde me dat hij haar tijdens de crowdfunding elke dag vroeg: “En, hoeveel ben ik waard?” Dit project veranderde ook mijn relatie met zijn ziekte. In het begin was ik bang, verdrietig en boos. Ik vond het een wonder dat hij uit zijn coma was ontwaakt, maar ik was gefrustreerd bij de gedachte dat hij door de gevolgen van zijn neurologische aandoeningen nooit meer dezelfde zou zijn. De fotografie heeft me geleerd om op een andere manier naar dingen te kijken, om zijn ziekte niet langer te hoeven ondergaan en om het te leren behandelbaar te maken door het als poëzie te zien. De camera amuseerde en stimuleerde hem en het stelde ons in staat om dingen uit te wisselen als een soort spelletje. Mensen vragen me vaak wat mijn droom is en ik antwoord dan dat het mijn droom was om dit project samen met mijn vader te kunnen doen. Helaas is hij twee maanden voordat het boek gedrukt werd, overleden. Tien dagen na zijn dood was ik in de drukkerij, wat heel bijzonder was, maar vreemd genoeg hielp het dat ik omgeven was door al die foto’s en interviews. Tegenwoordig is het boek enigszins ontoegankelijk omdat het niet op voorraad is. Ik realiseerde me dat het een beetje egoïstisch van me was, want ziekte is een realiteit voor veel mensen, of ze nu ziek zijn of zorg verlenen, en ik weet dat het sommige mensen veel goed heeft gedaan. Daarom is het mijn plicht om het opnieuw uit te geven. Zes jaar later besef ik tot mijn verdriet dat dit mijn belangrijkste en krachtigste project was, en het project waar ik het meest trots op ben.

We komen aan in Brussel ... Wat zou jouw missie als fotografe zijn?

Om alle soorten mensen, lichamen en ervaringen te laten zien, om het bestaan zichtbaar te maken van degenen die zijn uitgesloten van de gemeenschappelijke vertegenwoordiging. We moeten leren verantwoordelijkheid te nemen voor de manier waarop we naar dingen kijken, want als we clichés voor ogen hebben, realiseren we ons niet welke impact ze kunnen hebben op het leven van mensen.

charlotte abramow
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